dimanche 31 janvier 2010

8 Tracks - N°3






Au menu du raide et rien que du raide, du raide issu de la fameuse fracture 78/82, c’est qui « en raide » est un genre d'espèce de must. On commence par Bay of Pigs des crispés de la baie de San-Francisco qui ressemblent trop à des New Yorkais énervés pour être vraiment honnêtes - cette basse placide et cette guitare caoutchouteuse, ce chant nerveux qui doit plus à David Byrne qu’à quiconque – On poursuit avec les Dancing Cigarettes de Bloomington (Indiana) un bien belle clique roide, avec chanteuse amoindrie et saxophone sociopathe qui gazouillent de concert sur un bidule serré, anguleux et ironique... Les Model Citizens des New Yorkais produits par John Cale sont eux adeptes d’une sorte de jerk rigide qui réjouira les plus tendus d’entre vous... Je n’ai aucune information à fournir sur les Jazz Hipsters, ils n’ont sorti qu’un 45 tours, il est très bien. Outre la raideur on aimera beaucoup Les Limbo Race de Boston pour ces paroles immortelles : « I want the saliva Patti Smith spit out, the last time she sang the last time ». Tout le monde connaît ou devrait connaître Suicide Commando de No more (des Allemands malsains) c’est un smash-hit underground imparable, il a été remixé récemment par DJ Hell. J’ai déjà parlé des Sleepers ici c’est un groupe indispensable pour tout amateur de punk côte-ouest qui se respecte un peu. On fini avec les Social Climbers : une boite à rythmes, un orgue, du calme post-névrotique qui monte et redescend, que du bonheur.

Bay of Pigs - Addiction 3:08
The Dancing Cigarettes - Burn In Heaven 2:59
Model Citizens - You Are What You Wear 4:50
Jazz Hipsters - The Tendertrap 4:25
Limbo Race - Fluids 4:28
No More - Suicide Commando 3:14
The Sleepers - Forever 4:22
Social Climbers - Western World 5:08


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mercredi 27 janvier 2010

Adam Green - Minor Love (2010)



De son propre aveu Adam Green n’a jamais autant vomi que pendant cette année 2009 qui vient de s’achever là, il y a peu. Pour mieux comprendre cette confession presque gênante il faut savoir qu'en 2009 Adam avait de bonnes raisons pour être ainsi assailli par les « embarras gastriques » : un divorce mal négocié, une déprime bien négociée, elle, et un refuge assez peu raisonnable dans les gouffres de l’alcool.

Bon l’année dernière malgré tous ses tracas évoqués plus haut notre crooneur dépeigné a quand même eu le temps d'écrire une petite quinzaine de chansons. Oh pas grand-chose ces chansons ! elles durent toutes deux minutes et semblent avoir été écrites sous la table en trois.... pourtant elles sont presque très bien... avec des mots crus, beaucoup de fraîcheur et bizarrement aucune trace visible d’une quelconque gueule de bois...
Vous allez me dire qu'il n'y a pas de quoi sautiller de joie bêtement et que ces nouvelles chansons-là ne volent pas bien haut (forcement, car écrites sous la table) que c’est un disque moyen, un disque un peu facile et fainéant, qu’Adam Green a déjà fait beaucoup mieux avant, que déjà « Sixes & Sevens » frôlait le moyen... Vous aurez sûrement raison.... Là où vous aurez par contre tort d’avoir raison, c’est qu’un disque moyen d’Adam Green c’est toujours ça de pris, et que parfois on écoute certains disques moyens avec un plaisir que beaucoup de chefs-d'œuvre présupposés ne savent pas (plus ?) distiller...
Pour le reste et au-dessus du moyen Adam est encore nôtre meilleur crooneur dépeigné-indolent du moment , notre Sinatra sans mafia, notre Cohen sans épaisseur littéraire, notre Lou Reed sans casque ni moto (et sans femme à aimer), notre Jonathan Richman sans reggae égyptien... Bref, on aime toujours et encore Adam Green, le match qu’il vient de commencer contre son double hippie barbu Devendra Banhart est déjà plein de promesses, Adam fera le gentil qui vomit, Devendra le méchant émétique.

lundi 18 janvier 2010

L’incunable du jour (3)





Si la partie visible de Jean Claude Vannier est souvent remarquable, sa partie cachée pourrait bien être, comme chez l’iceberg, étonnamment plus conséquente. Ici on lachera donc un peu le visible et le remarquable de notre super arrangeur : toutes ses « participations » chez Gainsbourg, le « cultissime » (et fatiguant) Enfants Assassin des Mouches, les
petits ballons de France Gall… pour plonger dans l’invisible... dans ses six albums à lui où il oublie ses marmites de « sorcier des cordes » pour me mieux se retrouver chanteur ; un peu crooner, dandy et mélancolique...
Négligés, invisibles, jamais réédités pour des raisons que le pékin moyen ignore (effet Etaix ?) les six albums « chantés » par Vannier entre 1975 et 1990 sont absolument introuvables aujourd'hui. C'est l’un des plus grands scandales de l’industrie phonographique des temps qui nous occupe. En attendant, j'espère que ladite industrie ne m’en voudra pas trop de faire une partie de son boulot en postant, là en dessous, une bien belle chanson du terrible Vannier. Un incunable sanglant plein d'écholalie balistique... ou l’inverse.

« Mon nom est Browning
Et ma deVISE
Assassiner voler menTIR
Que tu sois flic ou bien forBAN
Viens faire un tour à mon enSEIGNE
Vise vise vise tire tire tire bang bang bang saigne saigne saigne
Si t'as plus un sou, plus d'deVISES
File à ta banque j'peux t'garanTIR
Qu'avec un bon Browning au BOUT
D'ton bras tes finances seront SAINES
Vise vise vise tire tire tire boum boum boum saigne saigne saigne »


Vannier chez Gonzai
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dimanche 17 janvier 2010

Teddi King - 'Round Midnight (1953)



« La nostalgie s’épancha en un monde nouveau, insondable - toi, ferveur de la Nuit, sommeil céleste, tu vins sur moi. »

Standards ocre, voix bleu cobalt, dans le fond un piano, une pluie de mercure léger. Rien de plus, c’est déjà beaucoup.
Je ne connaissais rien ou presque de Teddi King, deux trois vidéos sur Internet, des chansons sophistiquées, une fille spirituelle un verre à la main qui se moque gentiment de Tennessee Williams, de l’écume, une jolie écume… La fille est morte plus tard, un lupus, drôle de nom pour une maladie… Et puis, par hasard, je suis tombé sur ce disque, une merveille, six titres enregistrés en 1953, des standards: « Round Midnight », « It Never Entered My Mind », « I Concentrate On You »... un piano (Beryl Booker) seul et un peu lointain, comme s’il était saisi dans une autre pièce, et la voix de Teddi King, si proche elle, si intime, une voix qui nage en dansant dans son flot bleu, nostalgique et déjà mélancolique, moody feeling
Alors, je me suis dit qu’il fallait que j’en sache plus sur Teddi King, sur ses autres disques, sur sa vie… En entendant, presque toutes les nuits, je me suis mis à écouter ce disque, entre deux rêves, dans ce flou du corps encore endormi et de l’esprit clairvoyant, cet état latent après lequel, le lendemain, on ne se rappelle plus vraiment de ce que l’on a fait, mais avec toujours quelque chose qui demeure, même malgré nous… de toute éternité.



vendredi 15 janvier 2010

Liechtenstein - Survival Strategies in a Modern World (2009)



« Le gouffre est fatigue
la nuit est fatigue. »


2010 commence mal, 2010 est déjà sinistre, il n'y a pas un jour sans son lot d'anicroches, de catastrophes, de trépas inopportuns... Pas un jour sans cette implacable ambiance morose et sans cet horizon plus bouché que mon ventricule gauche... Vous allez me dire que ces histoires de dates ont beau ne pas avoir plus de sens qu'une vieille survivance judéo-chrétienne, il y a pourtant une chose de sûre, 2010 nous en veut plus que 2009 (à vous aussi ?) et pour un peu, en envisageant la suite, on se noierait dans le maussade !

Ah oui ! J'allais oublier, le disque dont il est censé être question ici, Survival Strategies in a Modern World par les Liechtenstein(s) , c'est un disque assez visité par la simplicité angulaire et par l'esprit des Raincoats avec aussi toutes leurs copines raides : Liliput et Kleenex, les Suissesses en furie... Tracey et les filles de la marine, Alison et les jeunes géants de marbre, et puis les affreuses Shaggs (dans le fond) avec leur papa et leurs pulls très moches (sur elles).

N. B. Il faut aussi dire que ce disque a quelque chose des cartes postales envoyées par les garçons écossais. Il faut également dire qu'il frôle parfois l’anecdotique et qu'il aurait bien pu
sortir en 1986 (bonne année pour les bordeaux rouges, me souffle-t-on).




vendredi 8 janvier 2010

 Fitness Forever - Personal Train (2009)



Il neige, vous n’avez certainement pas les boots adéquates alors avant de finir, figés et bienheureux, sous les flocons (comme Robert Walser) vous pouvez vous réchauffer, voir même pour certains fondre, devant ce disque. C'est un disque italien (et chanté en italien). Pour les instruments il est plein de glockenspiels, de tambourins et de cordes sucrées ; pour l’inspiration il est « so cute » et bubblegum avec ce goût Harpers Bizarre, Burt Bacharach (sans Warwick), Michel Legrand (sans son grand âge) . Bref un exemple assez rare et presque totalement réussi d'indie-lounge transalpin qui vous réjouira si vous êtes non diabétiques et qui en tous les cas aura l'immense avantage de vous réchauffer les pieds si vous avez la malencontreuse idée d’être mal chaussés sous les frimas, c’est déjà ça.