jeudi 15 juin 2023

Psychogeographie indoor (128)

 


« On demande une miette d’amour pour tous les jours. On nous en donne une tonne pour l’éternité, qu’est la mort » (GP)


3 octobre 2022.- Ciel se dégageant au fil de la journée (18°C). (Matin.) Qui y a-t-il de plus oublié, de plus dédoré, de plus obsolète, désuet et presque ranci que Paul Guth ? A priori, pas grand-chose et pas grand monde. Pourtant malgré tout cela Michel Crépu m'a donné l'envie de le lire son Histoire de la littérature française. Dans son Journal il l'a place très haute et les quelques citations qu'il en fait sont très bien, cocasses et pleines d'un grand sens de la légèreté qui me semble assez éloigné de l'ennui et du professoral. Comme il faut savoir rester dans les mêmes teintes, les mêmes eaux, Crépu m'a aussi donné l'envie de lire l'Âme sensible de Jean Dutourd. Pour lui c'est la plus belle chose écrite par un écrivain sur un autre écrivain (en l'occurrence Stendhal). Foire au dithyrambe ? Crépu se trompe-t-il en faisant ainsi l'éloge du vieux jeu et du suranné ? Je ne crois pas. Ce que j'ai pu lire du Dutourd critique n'avait rien de ravachard (je viens d'inventer ce mot, il résume parfaitement ce que je veux dire). Paul Guth et Jean Dutourd ! Si mon moi d'il y a quinze ans avait la capacité de regarder mon moi actuel je pense qu'il le ferait avec des airs dubitatifs tout en penchant la tête. (Après-midi.) Le soleil est là, mais bien trop bas. Le petit coin que j'avais trouvé hier est déjà bien bien entamé. Je ne lui donne pas trois jours pour disparaître dans un enfer automnal. Néanmoins pour rester dans l'obsolète et le mordoré après un dîner léger j'ai entamé la Belle journée d'Henry Céard. Impasse naturaliste ? Roman de rien sur rien ? Flaubert aux petits pieds ? Pour l'instant c'est assez bien, frôlant le pas mauvais, un peu triste et dévitalisé. On sent les regrets d'une autre Emma Bovary lui monter au cœur sans qu'elle ne se rende vraiment compte. Je crois avoir bien fait de mettre mes yeux dans tout ça.


4 octobre 2022.- Soleil automnal (18°C). Une belle journée d'Henry Céard. Une bourgeoise et un bourgeois quasi voisins se frôlent dans un escalier. Ils se donnent ensuite rendez-vous dans un restaurant avec salon privé. La bourgeoise est trop prude, le bourgeois trop idiot. Les plats passent et rien ne se passe. Une main sur une cuisse, un coup de serviette, presque une gifle, tout se dégonfle, les velléités d'adultère s'enlisent, les deux ne deviendront pas amants… La pluie tombe, le fiacre commandé pour le retour ne vient pas et comme on n’a rien à se dire on se regarde de biais tout en lisant les journaux du jour à la lueur des bacs de gaz. Le fiacre arrive enfin, le bourgeois raccompagne la bourgeoise, il finira sa soirée dans un bouge quelconque à la recherche d'une gourgandine plus accessible, la bourgeoise finira sa soirée dans la chambre conjugale où son mari l'attend en lisant le journal. Voilà la Belle Journée d'Henry Céard, plus qu'un roman sur rien, un roman sur le vide de l'existence, sur les trous qu'il faut combler pour ne pas verser dans la résignation grise, sur les illusions qui s'effilochent et sur le à quoi bon être là sur terre. Il y a de l'amertume dans tout ça (belles pages sur Paris, style photographique).

Jules Renard parle d'Henry Céard et d'Une Belle journée au début de sons Journal, pour lui c'est un « livre fait tout exprès pour tenir la petite place que les Goncourt lui réservaient dans leur bibliothèque. » Le livre vaut mieux que ce mot d’esprit.


5 octobre 2022.- Soleil et vague redoux (22°C). Labeur, lombalgie, gonalgie. Sieste. Quelques lignes du bougon Dutourd pour qui Oscar Wilde était le Père Goriot de la pédérastie ( Ben voyons ! ), une chronique de Éric Holder belle comme du Vialatte triste, les Cahiers de Cioran, ces lignes : « Lamentation et dérision – les deux activités pour lesquelles j’ai le plus d’aptitudes. »


6 octobre 2022.- Semblant de beau temps (22°C). Aphorismes faiblards :

Lorsque l'on veut faire bouger les choses on risque de les faire tomber.

On a connu très peu de passions calmes.

L'avantage du néo-féminisme c'est qu'il nous permet de voir la vraie nature des femmes. Elles sont fourbes.


8 octobre 2022.- Ciel gris suicide (17°C). Cervicalgie tenace, la forme est paralympique. De surcroît, une potentielle guerre nucléaire rôde. En attendant que tout explose vraiment je suis toujours dans les livres. Aujourd'hui grand écart lectoral puisque j'étais à l'alternat entre le Petit Bidon (et autres textes) de Christophe Tarkos et les Ténèbres et la nuit, le nouvel opus de Michael Connelly. Entre les deux, rien de vraiment commun. Les mots, peut-être, et encore… Chez Tarkos ils fluent, circulent, se heurtent entre eux, rebondissent (comme si un flux pouvait rebondir), se transmutent de l'écoulement à l'aérien pour mieux revenir en glaise d'une nouvelle forme poétique. C'est très beau et plus simple que ce que je tente d'écrire. Chez Connelly les mots ne sont là que pour transmettre des informations, ils concèdent au factuel et ne sont que le soubassement nécessaire d'une intrigue efficace et bien fagotée. Le Petit bidon de Tarkos est préfacé par Nathalie Quintane, qui fait un bel éloge de son ami, mais qui à mon humble avis (je suis un peu con) intellectualise un peu trop son propos (on pourrait voir Tarkos comme un tenant de la poésie brute, comme il y a de l'art brut). Les deux premières pages, l'auteur vu par lui-même, sont presque bouleversantes.

Le Connelly quant à lui n'est pas bouleversant, cela ne l'empêche pas d'être très bien. En tous les cas, c'est ce que laissent deviner les cent pages que j'ai boulottées dans la matinée. On retrouve une Renée Ballard, la nouvelle héroïne de Connelly, embarquée dans une intrigue où résonnent fortement les tambours de l'actualité. Le Covid, les violences faites aux femmes, le mouvement Black live matters. Harry Bosch ne passe plus que comme une ombre fantomale dans le décor (c'est l'aspect mélancolique du roman) et l'approche de Connelly est toujours la même, journalistique, factuelle, hypra documentée. Nous sommes en terrain connu.


9 octobre 2022.- Beau temps narquois et bien inutile (16°C). Ça avance la vie, on ne la voit pas passer et c'est déjà bientôt fini, on est presque mort. En trois jours mon petit coin de soleil n'existe quasiment plus, il s'est insensiblement dissipé dans l'ombre, c'est bien triste. Je n'ai pu poursuivre mes aventures lectorales en plein air que pendant un très court laps de temps, pas plus de trente minutes avant d'être rattrapé par une sourde opacité automnale, c'est fort peu et pas assez, je vais bientôt manquer de vitamines D, virer au morose, au troglodyte, à l'enfermé. Heureusement qu'à l'intérieur de mon petit intérieur mon canapé est toujours là, sans lui je ne serai qu'un mollusque perdu sans son rocher. Je me suis couché dessus, il m'a recueilli, et sous un plaid enveloppant je suis tout de même retourné à mes petites affaires de lecture. J'ai relu Le Bonhomme de merde de Tarkos, qui est loin d'en être de la merde. J'ai continué mon Connelly efficace où j'ai appris en détail le fonctionnement du service de maintenance de l'éclairage publique de la ville de Los Angeles (cette phrase est nulle, il a trop de de dedans). J'ai aussi appris quand dans cette même ville de Los Angeles (c'est aux États-Unis) on pratique pas moins de mille autopsies par semaine. C'est beaucoup, on est peu de choses.

(Air du temps.) Dans la mesure où j'étais mineur au moment des faits, dois-je porter plainte contre le moniteur qui en 1981, me donna une large gifle lors d'un camp de vacances à Vallorcine (74) ? Fricoter tel un girafon lubrique dans le dortoir des filles était certes un tort, mais était-ce une raison valable pour me claquer le beignet aussi vigoureusement ? Pour tout vous dire, j'en suis resté traumatisé. Un an plus tard dans un autre camp de vacances, cette fois-ci en Corse, j'étais toujours mineur lorsque lors d'un bivouac au clair de lune j'ai mis la main dans la culotte d'une monitrice, blonde et diaphane, qui ne trouva rien à redire et trouva bien au contraire cela fort agréable si j'en juge pas ses petits gémissants adoubant. Je ne chercherais pas à porter plainte contre elle. Il faut savoir rester gentleman.


10 octobre 2022.- Le soleil baisse, les nuages arrivent (21°C). Pas très inspiré, vous n'êtes pas obligé de lire les lignes qui suivent.

Malgré une intrigue poussive et une héroïne assez opaque (Renée Ballard, la « remplaçante » de ce bon vieux Harry Bosch), bien aimé le Connellly. Les concessions à l'air du temps n'assomment pas trop le tout et c'est du travail de professionnel. (Je sais, je donne l'impression de faire l'état des lieux après le boulot d'un artisan, d'un plombier ou d'un peintre en bâtiment, cependant il y a de ça chez Connelly). Ma lecture suivante est assurément moins dans l'efficacité et le pragmatique délassant puisqu'il s'agit de Performance le dernier roman-roman de Simon Liberati. Je dois être un peu masochiste, le côté vaseusement décadent et vomi séché dans la barbe de ce perpétuel déchevelé m'ennuie assez, mais allez savoir pourquoi, je persiste à vouloir lire ses livres en espérant y retrouver d'antiques promesses jadis entrevues. Bon au bout de cinquante pages je suis déjà déçu (et même pas en bien). Libérati tournaille autour de la face luciférienne des Rolling Stones, du visage d'ange de Marianne Faitfull, des fleurs fanées du Summer of Love et du parking d'Altamont. S'il s'était contenté de ces quelques ingrédients, cela aurait peut-être pu faire un éventuel bon livre… Mais non il faut qu'il joue aussi au romancier-romancier, qu'il balance de grands seaux de fiction pellucide à la face de ses lecteurs. Alors, il y a des sachets d'héroïne cachés dans une vulve, des mycoses vaginales qui montent au nez de son faux héros qui n'est que lui-même, une histoire d'amour torve et de auto-apitoiement patibulaire.



11 octobre 2022.- Temps nuageux (17°C). Évidemment hier j'ai été trop injuste avec Liberati. Son Performance n'est pas si mauvais que ça, il est même moins malin dans le pire sens et plus sincère que je ne pouvais le penser de prime abord. Ce que je ressentais comme de l'autoapitoiement n'est peut-être après tout qu'une façon un peu tordue de parler sans concession de lui-même (ou alors une délectation tout aussi tordue à se voir déclinant). Tandis que son faux héros transparent se pisse dessus plus qu'à son tour, Liberati ne donne pas l'impression de pisser sur ses lecteurs, c'est toujours ça. Reste que cette sincérité méphitique cette intimité transmuée en fiction et son alliage avec les arpents lucifériens des Rolling Stones ne fonctionne pas vraiment. Les deux parties cheminent parallèlement, mais jamais ensemble. D'un côté, Libérati aurait plutôt dû écrire un récit pénible et attachant sur lui-même de l'autre il aurait dû écrire un bouquin antihygiénique et un peu malsain sur la pire meilleure période de Brian jones (il avait de la matière). Il ne l'a pas fait, préférant le roman-roman. On y perd au change. (Tout cela mal dit, Liberati m'a tout de même l'envie de lire deux, trois choses. La biographie de Keith Richards qui est là dans ma pile de livres en attente, le Journal de Cecil Beaton, La Fin de Chéri de Colette.)

Demain, je reprendrai le punais chemin du labeur. L'entrain est modéré.


13 octobre 2022. Épaisse ouverture nuageuse (18°C)3 Labeur, résultat : dorsalgie, lombalgie, gonalgie, toux chronique… Et on veut nous faire travailler plus ! Dans quel but ? Que mort s'en suive ? En attendant un vague trépas engendré par le néo-libéralisme triomphant je suis tant bien que mal retourné dans les petites affaires de Paul Valéry. Il y parlait de l'ennui, j'aimerai bien m'ennuyer comme lui : « L'ennui est le sentiment que l'on a d'être soi-même une habitude, et de vivre… une non-existence sensible, comme si l'on eût la propriété de percevoir que l'on n'est pas. Percevoir que l'on n'existe pas ! L'ennui est finalement la réponse du même au même. »


14 octobre 2022.- Hygrométricité prononcée, l'air lui-même semble flotter (18°C). En picorant dans le Guide mondain des villages de France de Matthias Debureaux j'apprends qu'un jour de 1959 le camarade Jean Tenenbaum avait choisi son nom d'artiste (Jean Ferrat) en pointant le doigt au pif sur une carte de France. Comme ledit hasard ne manque pas de sel, ce doigt aléatoire était tombé comme par enchantement sur le village de Saint-Jean-Cap-Ferrat, qui comme chacun le sait est certainement la localité la moins potentiellement marxiste léniniste de l'hexagone (enfin aujourd'hui en 20222. peut-être n'était-ce pas le cas en 1959, ou alors il y aurait moyen de douter de la jugeote du camarade Ferrat).

Pour le reste, en dehors des livres, que de mauvaises nouvelles.


15 octobre 2022.- Beau temps, pour rien (21°C). Lourds tracas sur lesquels je ne m'étendrais pas… Restent les livres qui eux ne nous assomment pas tragiquement (quoique). Entamé Marilyn et JFK de François Forestier. Cet ouvrage est censé être une sorte d'enquête sur l'improbable couple Monroe Kennedy, mais au bout d'une centaine de pages de lecture je dois avouer avoir plutôt le sentiment de lire un truc d'éboueur malsain qui soulèverait les couvercles d'une multitude de poubelles aussi peu ragoûtantes les unes que les autres. C'est certes très précis et documenté, on y voit comme de la lie flotter à l'air libre, la crasse et les ongles sales de Marilyn, la matière cérébrale de JFK, ses multiples et divers épanchements priapiques, l'immondice du patriarche Joe Kennedy, les mafias et Sinatra, la fausse morale glutineuse de Robert Kennedy… Il n'empêche que tout cela devient assez vite fatiguant. Fatiguant parce que Forestier ne nous épargne de rien tout comme il n'épargne personne ; fatiguant parce que vu du fond d'une poubelle l'horizon n'est jamais fin comme l'ambre ; fatiguant parce que les ragots mélangés, un semblant de délectation pour le pire ne nous donne en définitive pas autre chose que du James Ellroy en pire, c'est-à-dire sans le style.


16 octobre 2022.- Indian summer (23°C). Malgré le beau temps lecture en extérieur impossible, soleil trop bas et bruit circonvoisin intenable, je me suis donc rapatrié vers mon petit intérieur qui m'attendait, froid et humide comme une grotte. « Il est temps de démythifier cette ère et de bâtir un nouveau mythe, depuis le caniveau jusqu'aux cieux ». Comme tout est dans tout Forestier confirme mes intuitions en citant Ellroy. Malheureusement, son bouquin s'il démythifie à foison reste dans le caniveau et ne monte jamais jusqu'aux cieux. Marilyn est vide, amorphe, une méduse qui n'est préoccupée que par son aura de star, son pouvoir de diva… Elle ne se passionne pour rien, jette ses multiples amants comme elle jette toutes ses affaires sur la banquette arrière de sa décapotable, elle n'est jamais vraiment émouvante, tout juste désirable mais pas sauvable. Quant à JFK il est presque pire avec son sourire figé son dos cabossé sa sexualité de lapin lubrique et ses magouilles… Tout cela est certainement vrai, la plume de Forestier ne semble pas romancer la réalité plus que ça, n'empêche on aurait préféré qu'elle touille un peu ailleurs que dans le fangeux.



17 octobre 2022.- Vent et douceur (20°C). Le tragique rôde toujours autour de moi alors j'ai pris un Lexomil et ouvert le livre au potentiel le plus sautillant dans ma pile de livres en attente. Il s'agit de Mes quatre semaines en France de Ring Lardner. Lardner était un journaliste, un écrivain aussi, spécialisé dans le sport et notamment le base-ball qui se diversifiera tardivement avec quelques histoires parfaitement humoristiques. Fitzgerald, qui était son ami, le citait plus qu'à son tour et il fut l'une des influences du père Hemingway. Dans Mes quatre semaines en France, il raconte ses courtes pérégrinations dans la France de la Première Guerre mondiale. Rien de batailleur, de tragique, de sinistre et de sordide, Lardner reste loin des tranchées et de la boucherie, ce qu'il décrit c'est la France de l'arrière, ses larges complications administratives, ses taxis furibards et homicides, ses autochtones fourbes, il faut bien le dire. C'est parfaitement drôle comme pourrait l'être du Benchley téléporté dans une époque, un lieu, un conflit incompréhensible, mais amusant. Le tout m'a arraché quelques demi-sourires, dans mon état psychologique c'est déjà beaucoup.


18 octobre 2022.- Douceur hors de saison (24°C). Dévastation…


(...)


30 octobre 2022.- Ma mère était morte, mon frère est mort… Tout se réduit et bientôt je pleurerai seul sur mon île.


(...)


3 novembre 2022.- Le chagrin est là, pas les mots.


4 novembre 2022.- À défaut d'écrire quelques mots qui ne viennent pas, je vais tenter d'exister ce qui ne sera pas si simple.


5 novembre 2022.- Les phases du deuil, sidération, hébétude, chagrin, colère.


6 novembre 2022.- Incapable d'écrire deux phrases, tout part dans les larmes.


Baltimore de David Simon. Neuf cents pages dévorées en quatre jours. Plongée journalistique dans l'enfer d'une cité américaine à la fin des années quatre-vingt. C'est assez formidable presque extraordinaire.


7 novembre 2022.- En écrivant ces lignes, j'ai l'impression de trahir mes morts. Peut-être faudrait-il que je me contente de parler du temps qu'il fait ?

« J'arrivai après le feu d'artifice. Mais peut-être restait-il quelques fusées non éclatées. » J’avais déjà lu les trois autres « routes » de Raymond Dumay – celles de Bourgogne d’Aquitaine et de Provence, autant de balades offrant un mélange de géographie heureuse et de dérives bouquetées autour du vin et de la littérature – aujourd’hui j’ai entamé la dernière route qu’il me restait à lire celle du Languedoc. C’est toujours épatant, il faut dire que le Languedoc ne fait rien pour ne pas être épatant… À Montpellier capitale de la Septimanie on visite le Jardin des plantes dans les traces de Valery Larbaud. À Grabels on boit un petit vin blanc avec Joseph Delteil. À Sète on oublie presque de monter jusqu’au cimetière marin, mais finalement on y monte et les pages sont fort belles. Plus tard et plus loin on rencontre Jeanne Galzy « la Colette du Languedoc »… Tout cela est très bien… rien à redire.


9 novembre 2022.- Il pleut (17°C). Je lis Life l'autobiographie de Keith Richards. Rien de puissamment littéraire — c'est de l'oral retranscrit et bidouillé en livre par un certain James Fox —, mais c'est tout même relativement croquignolet, à vue de nez assez peu édulcoré et en tous les cas toujours très intéressant. Je n'en dirai pas plus — mon inspiration est toujours en berne — Ah si seulement une simple constatation comme en toute chose — ici les débuts des (Rolling) Stones — l'accidentel est de mise.


10 novembre 2022.- Beau temps (14°C). L'autobiographie de Keith Richards est tout sauf assommante, on pourrait même dire qu'elle frôle l'épatant plus qu'à son tour et qu'en tous les cas elle satisfait le lecteur on lui offrant une large cargaison, des souvenirs des faits et des anecdotes qui ne semblent pas trop filtrées par une quelconque autocensure. L'ami Keith ne cache rien de ses frasques et addictions diverses et variées de ses amitiés qui virent au pire de ses histoires d'amour un peu tordues… Brian Jones en prend pour son grade et l'on n'est même pas étonné de le voir comme un appendice en décomposition que les Stones sont obligés de trimballer lors de leurs tournées, il y a quelques lignes assez drôles sur Allen Ginsberg « vieux sac à pets » qui pontifie sur tout… Loin des vacheries John Lennon est un peu porté au pinacle… Bref, c'est comme je le disais plus haut assez épatant. Les plus belles pages sont consacrées à la musique en elle-même, à son élaboration, aux techniques de jeu et d'enregistrement, à l'alchimie bizarre et parfois merveilleuse que peut offrir tout groupe de musique… On sent le type qui aime ce qu'il fait, et qui aime parler de ce qu'il fait.


11 novembre 2022.- Soleil (18°C). Il faisait beau, j'ai fait un détour par le cimetière, les fleurs sur la tombe de mon frère ne sont pas encore fanées…

Keith Richards, Life. Brian Jones noyé dans piscine, la pègre londonienne, Altamont et son parking tragique, Gram Parsons et l'amitié, le petit côté maléfique d'Anita Pallenberg, Mick Jagger et les mondanités, la Villa Nellcote et tout le tremblement, l'open tuning, les amphétamines, la cocaïne, les doses d'héroïne adroitement concoctées. En gros je connaissais déjà tout ça et je n'apprends pas grand-chose. Reste la verve de l'ami Keith, elle est formidable il faut bien le dire.


12 novembre 2022.- Brume jusqu'à midi, soleil couché à 16h30, entre les deux soleil, me semble t-il (11°C) Quoi de plus beau que les dernières lignes des métamorphoses d'Ovide ?


J’ai désormais achevé une œuvre que ni la colère de Jupiter
Ni le feu ni le fer ne pourront abolir, ni l’usure du temps.
Le jour de ma mort, qui n’aura prise que sur mon corps,
Pourra mettre à son gré un terme à l’incertaine durée de ma vie ;
Le meilleur de moi sera transporté, inaltérable,
Très haut par-delà les étoiles et mon nom ne s’effacera pas.
Aussi loin que s’étend sur les terres soumises la puissance romaine
Je serai lu par tous, reconnu à travers les siècles
Et si les pressentiments des poètes se réalisent, je vivrai.


Moins antique, quoique, toujours dans le Life de Richards. Bien au-delà des anecdotes croquignolettes, amour de la musique.


13 novembre 2022.- Brume (11°C). La dernière partie de Life est surtout consacrée aux relations un peu compliquées entre l'ami Keith et son vrai faux frère Mick. Elle est certes sincère et sans sentiments recuits, mais moins intéressante… Cela dit le tout reste très bien. Peut-être l'une des meilleures autobiographies de musicien donnant dans le rock (avec celle d'Elvis Costello ?).


To be continued.

2 commentaires:

Christophe a dit…

avec Bruce évidemment !

Philippe L a dit…

Pas lu.