mercredi 23 mai 2007

Wilco - Sky Blue Sky (2007)

« Parmi les tourbillons, les essaims, les averses de sons, Pierre entendait à présent des notes plus élevées qui, subtilement insinuantes, s’entrelaçaient aux mille ondulations de la mélodie ; respectueuses des lois de l’instrument, mais merveilleusement libres et hardies dans leur abandon, elles bondissaient et rebondissaient comme renvoyées par de multiples murailles, cependant qu’à chaque syllabe la forme d’Isabelle, enfouie dans sa chevelure, se balançait de-ci de-là, aussi abandonnée, aussi rapide, aussi libre ; et cela ne semblait point être un chant, ne semblait point formé par des lèvres, mais venait de sous le voile qui cachait la guitare. » (Herman Melville, Pierre ou les Ambiguïtés)


On pourrait dire de ce disque qu’il n’invente rien. Qu’il se contente d’être central en plein du milieu du territoire arpenté par Jeff Tweedy depuis une quinzaine d'années. Pas de réinvention, pas de remake déguisé Krautrock comme dans le dernier « A Ghost is Born » En gros un credo folk-rock pleinement assumé, serein et apaisé... central donc ; mais pas au milieu de la route. On pourrait d’ailleurs finement observer que pour éviter le milieu de cette route (Syndrome Eagles) chaque titre se révèle à lui-même, trouve sa propre combustion, dans le feu des guitares (parfois courtes et sèches comme l’allumette craquée... parfois quasi pyrotechniques, débridées et crépitantes de milles feux sybarites .) Cette cohorte de guitares cabotant tel un vaisseau ignifugé entre les duels coruscants pris chez Television, le mid-Floyd de « Wish You Here » et la pétulance moirée de Richard Thompson. Donc un disque à guitares, pas trop verbeuses (un peu) pas trop sommaires (ah non !) avec parfois quelques touches d’orgues de chez Dylan par-ci « Either Way » un piano de chez bastringue par-là « Walken »
Au-delà des références à une quelconque culture rock corrodée - et avec les guitares - c’est la voix de Jeff Tweedy qui semble décisive, elle n’a jamais été aussi belle et éloignée du centre de la route cette voix… sortie de magnifiques ornières, écorchée mais revenue de ses blessures, avec le poids du vécu qui ne l’alourdie pas mais au contraire la libère…
Vers la consolation… vers la quiétude, restons touchant et serein au milieu de la route... mais dans le brasier des guitares… . En parlant de quiétude, chose poignante : « Sky blue sky » est un disque sûr de lui-même, absolument tranquille alors qu’il n’a que le contraire comme sujet apparent : l’émiettement des âmes, le fait que nous soyons conçus pour mourir…
Tweedy pour contrarier toutes ces choses là, cherche la beauté. Elle est là palpable, il suffit d’un léger effort. Voilà derrière les branches... le ciel bleu.. l’abondance et l’inspiration... il y a de la matière. Il y a de la beauté dans l’apaisement, il y a de la beauté crépitante partout.



1 commentaire:

Anonyme a dit…

Belle chronique (comme d'habitude)

Pour ma part, Summerteeth reste indétrônable...

Pilou72