mardi 12 juin 2018

Syd Barrett - The Madcap Laughs/Barrett (1974)





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Le jeune Barrett était un peu ailleurs, il vivait dans un monde peuplé de gnomes, de démons et de bicyclettes roulant toutes seules dans un décor truffé de couleurs mélangées. Pour compliquer un peu plus les choses, le jeune Barrett qui avait les cheveux bien longs portait un gilet afghan et se maquillait les yeux avec du khôl, une sorte de poudre minérale d'origine arabe qui lui donnait une allure très belle, mais un peu maléfique. À l'âge de vingt ans, et après avoir écouté une quantité non négligeable de chanteurs noirs plaintifs, il monta avec quelques camarades pour le moins instruits un orchestre de pop-music où quand il ne chantonnait pas de courtes comptines enfantines il jouait à la guitare, et parfois d'une seule main, de longues litanies abracadabrantesques. Après un 45 tours rappelant le souvenir d'un travesti chapardant quelques menus effets féminins sur une corde à linge et un album plein de trucs astronomiques et lucifériens ses camarades de jeu commencèrent à le regarder de travers tout en se poussant mutuellement du coude. Visiblement le jeune Barrett posait plus d'un problème et son éviction fut donc décidée au débotté entre deux earl grey tout juste attiédis. Plus confus et désorienté que courroucé notre jeune ami retourna vivre chez sa mère quant à ses ex-camarades de jeu ils commencèrent une fructueuse seconde carrière qui fit leur bonheur financier tout comme celui d'une pétulante cohorte de vendeurs de chaînes haute fidélité.

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Paru en 1974 ce recueil à quatre faces rassemble les deux albums « composés » par le jeune Barrett après son inopportune xénélasie. Sur le recto de la pochette, il y a une orange, un grain de raisin, une boite d'allumettes et notre héros est assis en tailleur avec l'air un peu absent. À l'intérieur de la pochette on peut le voir tout nu et accompagné par une jouvencelle un peu maigrelette et aussi nue que lui, le parquet semble bien ciré. Au recto de la pochette, il est encore plus dépeigné que d'habitude et semble presque chagrin. Sur la première face du premier disque, les musiciens d'une clique molle recrutée dans la ville de Cambridge accompagnent le jeune Barrett, il y a une chanson admirable qui s'appelle Terrapin. Sur la seconde face, ses ex-camarades de jeu jouent aux infirmiers. L'ambiance est un peu lugubre, mais très belle, l'auditeur est ravi. L'autre disque est moins sombre, on rigole avec un éléphant effervescent, on boit de la limonade pour bébé. Il y a une romance consacrée au rat, cette bestiole très intelligente que l'on regarde bien à tort de biais et une belle chanson qui pleure sur les Dominos... On ne cessera jamais de réécouter tout ça.

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Après avoir enregistré ces deux disques, le jeune Barrett ne fit plus grand-chose. Il s’enferma dans une cave où, un jour, il tenta de passer la tête à travers le plafond. Les saisons, les années passèrent et bientôt il n'y eut plus de gnomes, de démons et de bicyclettes… Le caillot d'un soupir, la transe électrique d'un soupir... plus de jeune Barrett, plus rien...


1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bonjour,

Ici Camille de l'agence RP Ephélide (Eurockéennes, Rock en Seine, You Me At Six..)
Enchantée :)

Je me permets de te contacter car je pense que certaines de nos actualités pourraient te plaire. N'hésite pas à me répondre à promoweb@ephelide.net

A très vite,
Belle journée,
Camille.