jeudi 15 novembre 2012

Donald Fagen - Sunken Condos (2012)

 

La précision est une chose importante et Donald Fagen est toujours précis. Certains diront qu’il est même trop précis, qu’il manque totalement d’accident, d’anicroche et de tous ces obstacles obligatoires que l’on pose devant soi lorsque l’on se risque à vouloir trébucher dans l’émotion. Pourtant, il y a de l’émotion chez lui. Oserais-je dire qu’elle est plus longue à monter, subtile à percevoir et problématique à ressentir que chez bien d'autres ? Certainement un peu de tout cela. Avec Fagen nous n'avons jamais vraiment  mal (forcément il est loin de l’accident), il nous fait plutôt du bien, mais toujours par la bande et un brin perfidement. Disons que l’émotion rencontrée en l'écoutant a tout de la satisfaction retorse. J’y vois personnellement le triomphe du peaufiné, une régularité incroyable, une assurance, une harmonie entre l’esprit et la matière sonore à triturer si lissée, que tout ce déploiement de savoir-faire semble, à la longue, me conduire vers les rives ensoleillées d'un radieux étourdissement.
Pour le reste en dehors d’étourdir radieusement l’auditeur par sa précision, Donald Fagen est toujours ce New-Yorkais dépressif qui a incontestablement reçu une bonne cargaison de falbalas jazz-rock seventies sur le coin de  la tête. Cela ne l’empêche pas d’être encore l'un des meilleurs. L'un des meilleurs parce qu’il ne revendique rien, parce qu’il ne fait pas semblant d’inventer quoi que ce soit (à son âge forcement), parce qu’il se contente de faire très bien ce qu’il a toujours très bien fait. Avec ses chansons millimétrées faussement simples et vraiment futées, ses mots au cordeau et comme tirés par la ficelle de l’âge, Sunden Condos pourrait bien être son plus sautillant album depuis le multiplatiné Nightfly en 1982. Production impeccable, chaque chose à sa place, ponctualité métronomique qui vire singulièrement au sensuel (Sunden Condos est un disque précis et sensuel qui pétille d’énergie), foule d'accords. Comme la clique qui entoure Donald est parfaitement professionnelle et bien à même de faire mousser l'ensemble tout en évitant de le faire déborder dans les affres pépères du Steely Dan amoindri, il y a beaucoup de plaisir à prendre dans tout ça, presque du bonheur.
Voilà pour la musique, voilà pour la précision.



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