vendredi 19 janvier 2007

Psychogeographie indoor (2)



L’air hagard et un peu chiffonné, je me suis réveillé ce matin avec une envie assez moyenne d’arpenter ma bibliothèque, pas ma bibliothèque la vraie, la toisante non ma bibliothèque auxiliaire vous savez celle qui pourrait faire un peu honte, celle où l’on entasse en vitesse une somme de livres un peu problématiques, livres offerts par des gens manquant assurément d’un minimum de goût, livres achetés pour des raisons que l’on a fini d’oublier, livres lus dans l’enfance, chéris pour des raisons saugrenues.. La nostalgie de l’enfance tout ça … Je bute souvent l’air hagard et un peu endormi sur cette armoire à livres pour la simple et bonne raison qu’elle est située par un hasard topographique à côté de mon lit - vous savez la modeste couche d’où s’échappent nos rêves- , d’ailleurs je me demande dans quelle mesure cette proximité avec de la mauvaise littérature ne contamine pas mes songes ( à la longue pire que l’amiante et les OGM tout ça), ce qui expliquerait un mal de tête persistant ce matin à moins que ce ne soit l’excès de Gewurztraminer de la vieille . Bon voilà vous me direz c’est bien joli tout ça, mais posé sur cette modeste succession de planche vaguement blanche quels sont ces volumes qui méritent aussi peu de considération ? En fait, cette bibliothèque n’est même pas un enfer, l’enfer est ailleurs dans la grande, la vraie bibliothèque celle qui peut se laisser admirer par le visiteur curieux, visiteur qui pourra le regard en suspend se laisser tromper par une troupe bien ordonnée de littérature lactescente et vaniteuse, on est snob ou pas assurément.
Ma bibliothèque auxiliaire elle a très peu de potentiel snob à l’inverse de l’autre donc… on y trouve principalement de la littérature policière, tout Lawrence Block (J’adore Lawrence Block) tout Dennis Lehane sauf Mystic River, il faut lire Dennis Lehane merde quoi ! Tout Ellroy (mais vous savez déjà pour Ellroy), presque tous les Michael Connelly avec leur efficacité fourbe, quelques Donald Westlake avec leur drôlerie, les classiques … Goodis , Thompson, Chandler et tout le tremblement, tout Manchette même les merveilleuses chroniques … bon jusqu’à présent rien de honteux , mais voilà que mon regard s’arrête interloqué sur un volume de Delacorta ! Livre complètement oublié et d’une provenance indéterminée ! Intégrale de plus de 600 pages en plus ! Argh ! Delacorta symptôme eighties définitif entre la légèreté publicitaire et l’inconséquent le plus total ! Avec ses héroïnes tout juste pubères que maintenant ce drôle d’oiseau serait en prison ! Finalement chez Delacorta , il y a pas mal de charme, du charme flottant étourdi terriblement vieillot eigthies alors que maintenant l’époque est lourde … Pas loin du Delacorta il y a des Marc Behm, pas loin des Behm trois-quatre Pierre Siniac presque collés entre eux, à l’étage du dessous une succession de San Antonio lus dans l’enfance certains achetés chez de chafouins bouquinistes sur les quais de Saône. Pour rester local un livre d’une amie sur la pêche dans les Dombes ! plus loin quelques René Belletto et un Calaferte que je n’aime pas (la mécanique des femmes) les autres Calaferte sont dans la grande bibliothèque, mais ne succombons pas à l’effet quenelles … et concédons quelque temps à d’autres livres terriblement problématiques ! Un Luc Ferry oui un Luc Ferry ! « Le nouvel ordre écologique » assez peu croquignolet où il est question d’écologistes vaguement totalitaires c’est une manie chez le dépeigné étudié ça les écolos fachos … livre sinistre donc un peu plus loin pour rester dans les anciens dépeignés un Regis Debray assommant « Vie et mort de l’image » un Finkielkraut (sur Péguy ) furieux on se demande bien pourquoi ? Des livres d’Edwin Plenel de Pierre Bourdieu , d'autres livres que je n’ose même pas évoquer le rouge au front ... Plus en adéquation avec moi-même : les mémoires de Groucho Marx … La correspondance de François Truffaut, les cent meilleurs dessins de Chaval , des atlas de géographie qui tiennent avec des bouts de scotch des choses de science fiction (K Dick, C. Clarke, E =Mc2 …), mais aussi de la mauvaise littérature : Beigbeder , Ravalec, Dantec, Jean Marc Roberts , Patrick Besson ! Oui un livre de Patrick Besson ! Le pseudo haineux du Figaro ou de l’Humanité je sais plus bien … et bien sachez que j’exorcise dans le vide ! Ce livre de Besson « Lettre à un ami perdu » est une assez jolie chose, chronique d’un amour débutant dans le Paris de 1980 avec la neige qui fond et la boue qui vient, un peu fitzgéraldien presque beau … d’ailleurs à côté dans ma bibliothèque auxiliaire il y un Fitzgerald « La sorcière rousse » peut-être que le talent est contagieux … non loin un Saul Below touche un Henry James qui frôle un Modiano qui caresse un Lao-tseu, finalement je vais peut-être refaire de beaux rêves …

1 commentaire:

Anonyme a dit…

J'ai découvert Fitzgerald, il y a trois jours, et j'ai été très étonné par ses nouvelles. Bien meilleures que je ne le supposais, elles contiennent quelques pages parfaites et je me suis surpris à relire certains paragraphes. J'ignorais qu'il s'agissait d'un écrivain si talentueux. Avant de le lire, j'imaginais qu'il était une sorte de second Salinger, c'est-à-dire un auteur pour les jeunes gens, voire pour les ados alors que c'est un très grand styliste, un homme doué de beaucoup d'esprit.

Je lis en ce moment Bruce Chatwin que j'aime beaucoup et essaye de lire du Paul Nizan mais sans y arriver, bien que j'ai récemment adoré "La complainte du carabin qui disséqua sa petite amie en fumant deux paquets de Maryland" aux éditions 1001 nuits du même Nizan.