Ben voilà un jour on était cinq à boire une bière et on s’aperçoit qu’il y avait un batteur, un bassiste, deux guitaristes et moi ! Ben vlan ni une ni deux on monte un groupe ! Moi j’avais des bouts de textes qui traînaient et un local pour répéter, un truc immonde qui appartenait à un louer de vélos dont je baisais la mère. Un vrai quignon de merde ce loueur de vélos, il avait tellement peur qu’on choure tout le matos de son bouiboui qu’il nous bouclait dedans à double tour de minuit à six heures du matin. A six heures, il se pointait l’air méfiant et ébouriffé et nous laissait sortir en échange d’une modeste rançon de trois dollars, après dans la rue échappés du bouiboui on l’entendait de loin taper sur notre batterie comme un dératé, un drôle de loueur de vélos ! le local a flambé quelques années plus tard …
Au début on jouait du rhytm’n’blues des reprises d’Otis Redding, Archie Bell, Sonny Williamson.. Notre public était principalement noir… et saoul. On faisait de notre mieux, en faisait les malins, le show, le petit Sylvain gigotait et les clodos tapaient dans leurs mains. Un jour un type nous a repérés, Martin Thau un drôle de gus il se pointe là devant nous, nous fait miroiter des trucs et des bidules et nous signe !
Je ne suis pas un intellectuel, mais à l’époque je fricotais pas mal avec la clique d’Andy Warhol, la factory tout le machin, la nébuleuse de trafiqués du ciboulot, piquouzés et autres travelos - que du bonheur quoi ! Et ben voilà que nous les petits gars purement hétérosexuels on s’inspire de ça ! Le « Théâtre du ridicule » c’est le truc coco ! Ce putain de cirque sybarite c’est pour nous ! Alors voilà les bas résilles, les talons hauts et le maquillage. Faillait voir Johnny Tonnerre marcher pour la première fois avec des talons hauts, une sacrée rigolade, en plus il était si peu straight Johnny Tonnerre !
Donc moi je prends les bidules et les fanfreluches de chez Warhol mais en fait le vrai théoricien c’était Killer Kane. Un type avec des goûts musicaux d’une perversité sans nom, un type capable de réciter les vers d’une chanson des Seeds et capable de me demander de les méditer ces fameux de vers ! Un mystique du rock psalmodiant un extrait d’une seconde face des 13th floor avec un air de conspirateur. Johnny Tonnerre était plus hard rock et le petit Sylvain plus pop un peu amoureux de T Rex et de l’autre bouclé de Bolan.
On est devenu assez hype, et assez vite , une petite attraction rafraîchissante pour la faune new-yorkaise. On jouait rarement devant plus de cinquante personnes dans notre élément quoi à l’aise et et puis voilà que Martin Thau nous envoie en Angleterre faire la première partie des Faces avec ce connard de Rod Stewart ! C’est le début du cirque, de la foire de tout le boxon en fait, les Anglais nous regardent de travers mais nous adorent en fait, on devient le truc… Apres en Angleterre il nous arrive du croquignolet et du moins croquignolet : je ne sais pas par exemple qui a eu l’idée débile de plongé Bill Ficca notre batteur dans un bain d’eau froide, ben il avait pris un peu trop d’amphétamines et bu un coup de trop mais bon il s’étouffait dans son vomi alors l’immerger dans une baignoire glacée c’était bien une idée d’anglais, Bill est mort il s’est noyé dans cinquante centimètres d’eau et nous on est rentré à New York avec un gros mal de tronche, pour tout dire on l’avait assez mauvaise.
Ah ! Oui tiens aussi en parlant de vomi, cette histoire de « vomi punk .» Vous vous souvenez, en 77 tous ces groupes qui se mettaient à gerber sur scène en ce réclamant de l’héritage des New York Dolls ? Ok c’était juste une énorme connerie, un accident. Un jour, pendant notre seconde tournée anglaise, précisément à Newcastle. on avait passé la journée à boire de la bière rousse locale comme des chameaux -à croire qu’on voulait faire des réserves-. Jerry Nolan notre nouveau batteur avait dû boire encore plus que nous autres parce que le soir, pendant le concert, en plein milieu d’une chanson le voilà qui gerbe sur ses fûts. Il ne s’arrête pas de jouer pour autant. Il cogne ses caisses comme un dératé et commence à projeter des miettes de dégueulis tout autour de lui. Du coup, vous voyez ce que c’est : quand quelqu’un vomit autour de vous, entre le spectacle et l’odeur, c’est contagieux vous avez toutes les chances de vomir à votre tour, une réaction en chaîne. La théorie des dominos. Et ben voilà ça n’a pas raté ! Killer Kane n’a pas tardé à dégueuler aussi, sans s’arrêter de jouer. Quand le petit Sylvain a vu ça, il s’est mis à gerber aussi. L’odeur finit bientôt par incommoder Johnny Tonnerre – qui de toute façon a toujours été.. heu… fragile de ce coté là – et Johnny se met à l’ouvrage lui aussi quasiment devant mon nez ! La seconde d’après j’ouvre la bouche pour chanter et c’est mes tripes qui sont sorties. Du coup, ces cons d’Anglais ont pris ça pour un jeu de scène. Ca leur a plu, et ils se sont tous efforcés de faire pareil. On a fini le concert devant des types qui s’enfonçaient l’avant bras dans la gorge pour mieux vomir. La presse en a parlé et pendant le reste de la tournée anglaise, il s’est trouvé des types pour se forcer à gerber pendant que l’on jouait. Un truc très chic, une mode ! Il y a aussi cette histoire à Orly où Johnny avait gerbé sur les pontes de notre label et la presse de titrer « Les New York Dolls vomissent sur le show biz » alors que tout ça était accidentel, que Johnny avait seulement le foie fragile après un vol arrosé de moult cognacs…
En revenant de cette tournée mémorable, même ma mère ne me croyais pas ! Elle était scandalisée « Quand même David, tu devrais réfléchir avant de faire des choses pareilles. Tous ces jeunes gens qui t’admirent et cherchent à t’imiter. Tu ferais mieux de leur donner l’exemple plutôt que des les inciter à vomir partout ! Comme si de vrais musiciens vomissaient sur scène !»
Apres le vomi et tout ça les albums, le presque succès et tout le toutim, ce petit con anglais, Malcom McLaren est arrivé il nous avait habillés avec des pantalons en cuir rouge et des trucs communistes dans le fond. Ce type se prenait pour notre manager alors qu’il était tout juste notre habilleuse et rien de plus ! En fait des managers on en avait au moins cinq ! Ils passaient leur temps à s’engueuler entre eux. C’était distrayant … Un jour Marty Thau c’est barré pour Alan Vega et l’autre barge de Martin Rev, et nous à laissés avec ces requins. Le début de la fin.
On a fini le truc par une tournée misérable en Floride Johnny gerbait (une manie) il était en manque, nos dealers habituels ayant été arrêtés par la police de cet état de merde il avait décidé de tout planter pour se réapprovisionner tranquillement à New York, et me voilà tout seul avec le petit Sylvain en Floride au milieu des petits vieux, les autres préférant suivre Johnny Tonnerre. Fin de l’aventure comme ils disent…
A présent ma maman serait fière de moi, je fais dans le cabaret, Buster Poindexter c’est moi les autres sont tous morts ou presque, j’ai le foie solide et une femme adorable, je suis un rescapé voilà c’est ça.
lundi 10 décembre 2007
Le « croquignolet » du jour - David Johansen
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