dimanche 25 novembre 2018

T. Rex - Electric Warrior (1971)


Publié en 1971 Electric Warrior nous permet d'entendre l'elfe cyclothymique Bolan au début de son pic de forme glamouresque. Il vient de virer son percussionniste timbré, Steve Took celui qui voulait introduire du LSD dans les canalisations lors d'une calamiteuse tournée américaine, il vient aussi d'abandonner le folk à bougies, les longues litanies inspirées par Tolkien ou William Blake pour mieux se retrouver électrique et innocent dans un genre de rock réduit à l’os, un truc enfantin et sexy où résonne l’écho de ses premiers émois musicaux, le rockabilly, Cochran ce genre de choses. Disons le tout net, l'album résultant de cette toute nouvelle transformation est absolument génial. Les paroles sont d'un astigmatisme qui confine au non-sens le plus sautillant qui soit, Bolan semble obsédé par le ciel et par le sexe, et la musique n'est vraiment pas en reste. Je ne rentrerai pas dans des détails que vous devez tous connaître, mais souvenez-vous simplement de ces tueries rudimentaires et pleines de stupre (faussement?) innocent que sont Get It On, Mambo Sun ou Jeepster, souvenez-vous de ces merveilles bubblegum qui virent à déréliction camp que sont Planet Queen ou The Motivator, vous n'avez pas besoin de moi pour vous souvenir de Cosmic Dancer, il toujours dans votre tête, quant à Rip Off il est certainement inutile de vous rappeler que c'est tout simplement un monument !... Un Everest !... Que dis-je ?... Un Nix Olympica indépassable !

lundi 19 novembre 2018

Bruce Springsteen - Nebraska (1982)



Évidemment en 1982 pour moi, Bruce Springsteen c'était un peu l'ennemi. Que voulez vous, son tricot de peau, ses biscoteaux saillants, son héroïsme à tous crins, tout cela avec de quoi révulser l'endive blafarde que je me trouvais être. Pourtant deux ans plus tôt j'avais presque aimé son double album The River, allant jusqu'à l'écouter en mode schizo me cachant à moi-même un goût assez extravagant pour les choses bouseuses pleines de bravoure. Je crois me souvenir que The River était sorti en octobre et il est bien possible qu'il ait été le double album de mon automne 1980 (sorti en juillet, Closer de qui vous savez fut l'album de mon été 1980, et des cent soixante-trois saisons suivantes). Donc en 1982 jeune et certainement un peu idiot, je n'avais pas jeté la moindre oreille dans ce Nebraska là, préférant le toiser de toute ma hauteur tout en affirmant que les Lords of the New Church étaient tout de même clairement plus intéressants. J'avais bien tort, pas sur les Lords of the New Church puisque ce cénacle de vieux punks décatis reste indubitablement ultra cool, mais sur le Nebraska de l'ami Bruce... oui, certainement. En fait, j'ai découvert vraiment cet album, quatre ans plus tard, en 1986 quand le titre State Trooper parvint jusqu'à mes oreilles paresseuses par le biais de quelques ondes radiophoniques. Disons que, pour moi, ce fut une révélation digne de Paul Claudel passant devant le « second pilier à l'entrée du chœur à droite du côté de la sacristie de Notre-Dame de Paris ». Figurez-vous que « gros biscoteaux » hululait tel le suicidaire Alan Vega ! No more no less ! Raisonnablement intrigué et prenant ma non-vitalité ontologique à deux mains je décidais bien vite de chaparder l’objet de ma toute nouvelle curiosité dans un estaminet de la Fédération Nationale d'Achat des Cadres. J’accomplis mon acte délictueux indolemment et sans la moindre panique et me retrouvait bien vite en possession de la Musicassette que vous pouvez admirer sur la photographie qui accompagne ce texte parfois un peu trop digressif. À son écoute je ne fus pas vraiment déçu, c'était bien ce que j'en attendais, un recueil de chansons dépouillées enregistré à la maison sur un magnétophone 4 pistes. Du Springsteen à poil et sans tricot de peau, mais aussi, et surtout, un truc d’écrivain de chanson qui tournait autour du « rêve américain » et de ses perdants réveillés en plein cauchemar. Chaque chanson aurait pu être une nouvelle, un roman voire pire un film ! Jugez par vous même : un type globalement fiévreux et pas trop recommandable zigzaguait bien trop vite sur un highway pluvieux tout en espérant éviter la maréchaussée, un autre type tuait un pauvre bougre et en prenait pour 99 ans, un foutriquet frénétique trucidait une dizaine de personnes au débotté et finissait par frire sur une chaise électrique un poil turpide… Mes vagues intuitions ne m'avaient donc pas trompé, même si sur sa fin quelques gouttes de lumière cendreuses tombaient ici ou là Nebraska était bien l'album globalement maussade et si peu héroïque (quoique) que j'avais imaginé. En somme, tout pour réjouir le gringalet blafard en quête de sinistrose virile qui sommeillait en moi.


jeudi 15 novembre 2018

Prefab Sprout - Steve McQueen (1985)



Steve McQueen, ce grand parano renifleur de cocaïne qui chiffonnait ses femmes plus que de raison, n'était pas si relax que ça. Ses héritiers n'étaient pas mieux. En 1985 ils prirent l’idée de vouloir attaquer en justice les Prefab Sprout (in french, les bourgeons préfabriqués) une sautillante clique confortable pop originaire de Newcastle upon Tyne (c'est presque en Écosse) qui voulait sortir un album en le baptisant d'un coolissime Steve McQueen de dessous les fagots ! L'histoire fut à demi saumâtre puisque cet album finit tout de même par voir le jour, mais avec deux titres différents, Steve McQueen en Europe et Two Wheels Good aux États-Unis d'Amérique. Pour le reste et en dehors du judiciaire, 33 ans plus tard cet album est toujours vraiment très bien et pas du tout chicaneur. On peut y entendre des chansons hyper bien fagotées qui flottent avec un cynisme léger autour de quelques adynamies pour le moins humaines, la luxure, l’infidélité, les regrets… Le jeune Paddy McAloon, chanteur compositeur et parolier, se révèle être un formidable « écrivain de chanson » et la production à tendance luxuriante de l’impeccable Thomas Dolby est formidable, que demander de plus ?


vendredi 9 novembre 2018

Téléphone - Au cœur de la nuit (1980)


Figurez vous que mon premier récital de « musique rythmée pour jeunes » fut une prestation du groupe français Téléphone au Palais des Sports de Lyon en 1979. Pour être honnête avec vous, je n'ai pas un très vif souvenir de ce baptême-là. En fait je me souviens surtout qu'avant l'entrée en piste des Rolling Stones du Boulevard Raspail les « grands » étaient assis à même le sol dans une forme d'immense grand rond vaguement communautaire et qu'ils attendaient le début des hostilités en fumant moult cigarettes très odorantes. Pour le reste, il me semble que le chanteur transpirait abondamment et qu'il était pour le moins lippu, le guitariste était quant à lui quasi plus maigre que moi tout en restant très maître de son bel instrument, le batteur tambourinait avec une appétence super keithmooniene et la bassiste minaudait un galurin bohème posé de guingois sur la tête. Briquets allumés et tendus, écharpes mauves voltigeant à tous les vents, iI est bien possible que la fin du concert ait frôlé les rivages du pathétique, rien n'est moi sûr, tout cela est assez relégué dans le goulag de ma mémoire.


jeudi 1 novembre 2018

The Beach Boys ‎– 66/69 (1978)



Musicalement j'ai dû cesser d'être vraiment avec mon temps aux environs de 1985. Le punk et le post-punk étaient déjà une histoire ancienne et à côté des garçons coiffeurs il y avait peu de groupes sur lesquels je pensais devoir pouvoir compter. Les Smiths un temps, Aztec Camera, Prefab Sprout et d'autres bricoleurs tâtonnants de la pop en anorak aujourd’hui oubliés. Chez les Américains ces groupes qui tournicotaient autour du bidule rock, Gun Club, Unknowns, Cramps, Wall Of Woodoo ou X. Du côté des choses vaguement bruitistes Hüsker Dü, Dinosaur Jr ou les Replacements (ne me parlez pas de Sonic Youth!). Plus délicats, il y avait bien les petits gars du Paisley Underground, ce faux vrai mouvement déjà un peu rétro, mais je suis globalement passé à côté, le découvrant plus tard et presque par la bande. En parlant de rétro et de découverte tardive, il me semble que c'est en 1986 que j'ai pour la première fois acheté un disque qui n'était pas de mon temps, cela devait être un spicilège des Beach Boys (vous pouvez le voir sur la photographie affichée sous ses quelques lignes rabougries). Ce fut, pour moi, le début d'une curieuse lame de fond qui allait m’entraîner vers des antiquités de plus en plus mordorées. Pendant quelques années (une demi-décennie), en dehors de deux trois exceptions notables (Pixies, Sebadoh, Nirvana) je n'écouterais plus que des vieilleries, des songwriters tout à fait décédés (Tim Buckley, Tim Hardin, Nick Drake…) ou quasi décédés (Scott Walker, Arthur Lee …) du jazz « historique », peu de java. Avec l’avènement des musiques électroniques je tenterais bien de rattraper l'époque, mais quant au Rock et à ses succédanés (pop, indie, folk à bougies et tout ce que vous voulez) le mal était là, insidieux inoculé, je n'aurais pas le grand plaisir de découvrir Blur, Oasis ou Radiohead avec tout le monde. Imaginez mon grand désarroi.