mercredi 29 avril 2015

Solitude de l'audionaute de fond (14)



21 avril 2015. Silver Apples – Silver Apples (1968) Certainement la plus grande influence du suicidaire Alan Vega. Des grands précurseurs, inventeurs du punk synthétique dix ans avant l'heure légale. Un primo synthé zigouigoui (le Simeon, neuf oscillateurs et quatre-vingt-six commandes manuelles), une cacophonie bourdonnante, des tambours mécaniques et un chanteur psychobilisant.
Pour rester punk synthétique et psychotique, l'auditeur averti pourra écouter les Screamers, un combo furieux de Los Angeles, l'un des plus beaux représentants de la tendance synth-punk sur laquelle il est bien possible que nous revenions plus en détail un jour (je vous épargne leur ode à Eva Braun, elle fait mal aux oreilles…. Et aux yeux)

22 avril 2015. Vadrouillé un grande partie de la soirée sur la page YouTube de la radio de Seattle KEXP qui propose quelques sessions de groupes plus contemporains que ma rotule gauche. Même s'il faut faire le tri entre hipsters tendance barbe broussailleuse et hispters tendance chapeau bariolé, il y a quelques pépites à dénicher. Une session du sympathique Mac Demarco avec ses amis normcores moustachus, deux titres croustillants (les deux premiers) et quelques saillies drolatiques. Une autre session de Matthew E. White qui chuchote occasionnellement comme pourrait chuchoter l’hypothétique arrière petit fils hippie de Whispering Jack Smith. En parlant de ce dernier et en faisant un joli salto arrière de 90 ans, je vous laisse écouter l'une de ses plus belles choses (Me And My Shadow), une merveille de délicatesse ( le niveau monte assurément).

23 avril 2015. Musicalement j'ai dû cesser d'être vraiment avec mon temps aux environs de 1985. Le punk et le post-punk étaient déjà une histoire ancienne et à côté des garçons coiffeurs il y avait peu de groupes sur lesquels je pensais devoir pouvoir compter. Les Smiths un temps, Aztec Camera ou Prefab Sprout, d'autres bricoleurs tâtonnants de la pop en anorak aujourd’hui oubliés, chez les Américains ces groupes qui tournicotaient autour du bidule rock  : Gun Club, Unknowns, Cramps, Wall Of Woodoo ou X. Du côté des choses vaguement bruitistes Hüsker Dü, Dinosaur Jr ou les Replacements (ne me parlez pas de Sonic Youth!). Plus délicats, il y avait bien les petits gars du Paisley Underground, ce faux vrai mouvement déjà un peu rétro, mais je suis globalement passé à côté, le découvrant plus tard et presque par la bande. En parlant de rétro et de découverte tardive, il me semble que c'est en 1986 que j'ai pour la première fois acheté un disque qui n'était pas de mon temps, cela devait être un spicilège des Beach Boys, je ne me souviens plus très bien. En tous les cas, c'était pour moi, le début d'une curieuse lame de fond qui allait m’entraîner vers des antiquités de plus en plus mordorées. Pendant quelques années (une demi-décennie), en dehors de deux trois exceptions notables (Pixies, Sebadoh, Nirvana) je n'écouterais plus que des vieilleries, des songwriters tout à fait décédés (Tim Buckley, Tim Hardin, Nick Drake…) ou quasi décédés (Scott Walker, Arthur Lee …) du jazz « historique », peu de java. Avec l’avènement des musiques électroniques je tenterais bien de rattraper l'époque, mais quant au Rock et à ses succédanés (pop, indie, folk à bougies et tout ce que vous voulez) le mal était là, insidieux inoculé, je n'aurais pas le grand plaisir de découvrir Blur, Oasis ou Radiohead avec tout le monde. Imaginez mon grand désarroi.

24 avril 2015. Richard Barone – Cool Blue Halo (1987) Deux guitares, un piano, un violoncelle, des chansons… Le premier album solo de Richard Barone enregistré live au Bottom Line club de New York en 1987. Des chansons, nouvelles et anciennes, des reprises bien choisies : Bolan, Bowie, Beatles... C'est un assez bon disque ; bien fixé dans ses limites (les limites de l’unplugged) avec toujours ce que l’on aime chez Richard Barone (et les Bongos), cette voix suave, cette petite touche italo-romantique, cette légère blessure et ce calme nerveux ; rien de crucial, mais juste la sensation rassurante de se glisser dans un rêve pop-rock perdu.
Moins sophistiqué, moins précieux, j'écoute Country Dick Manitoba, un cow-punk au baryton abyssal (Indigo River). Il est mort d'une mauvaise crise cardiaque en 1995 à l'âge de 40 ans et ont lui doit quelques belles croquignoleries bouseuses avec son groupe les Beat Farmers. Pour rester un tantinet bouseux, il y a cette belle prestation des Blasters datant de 1981 (I'm Shakin) et comme tout est un peu dans tout il y a cette vraie merveille d'Illinois Jacquet parfaitement secondé par la guitare de Tiny Grines (The Blues That's Me).

25 avril 2015. Je passe de Junior Kimbrough (Sad Days, Lonely Nights) à Ali Farka Toure (Heygana), de Vieux Farka Touré (Touri) à Boubacar Traoré (Mariama), du blues et du sublime, forcement sublime. Comme il me reste un peu de temps, j'écoute The Rev. Sister Mary M. Nelson, un prêcheur pentecôtiste de Menphis. Il a enregistré 4 faces en 1928, une voix pleine de graviers.

26 avril 2015. Sloan – One Chord To Another (1996) Ce combo canadien est responsable de quelques jolis albums dans un genre plus power-pop qu'autre chose. Celui-ci pourrait bien être leur meilleur. Guitares resserrées, évidence mélodique, qualité des arrangements. Rien de fulminant, mais un court plaisir un peu partout.
Paul Desmond – Glad to be Unhappy (1963) Paul Desmond plaisantait à moitié lorsqu'il se décrivait comme l'altiste le plus lent du monde. Il suffit d'écouter cet album où il n’accélère jamais le tempo pour s'en rendre vraiment compte. Parfaite coalescence cool avec Jim Hall (guitariste « séminal » s'il en fut), contrebasse moelleuse et drums effleurées-brassées. Par-dessus tout la pureté de timbre de Desmond qui flottille tendrement. Tout pour être heureux d'être malheureux .
Mark Eric - A Midsummer's Day Dream (1968) Beau, blond, bronzé, avec de grandes dents, une voix de fausset et une petite science de la pop douce et ensoleillée Mark Eric avait presque tout pour lui. Il n’en fera pourtant quasiment rien abandonnant une « carrière musicale » légèrement prometteuse pour se recycler piteusement dans cette sale chose qu’est le cinéma (une rainette gluante vaguement art global qui se veut plus grosse qu’un bœuf). C’est assez dommage, car son seul et unique effort discographique, ce A Midsummer's Day Dream dont il est ici question, est vraiment bien. Un peu planté en 1965 quand nous sommes en 1968 mais ce n’est pas très grave, les arrangements de cordes qui rappellent les meilleures productions de Curt Boettcher sont bien plus révolutionnaires que nombre de pavés lancés au petit bonheur la chance. On passera sur le falseto un brin aléatoire de Mark Eric - celui de Brian Wilson l’est presque tout autant - et on sautillera doucement tout en l’écoutant gazouiller un peu de travers ses histoires de surfeurs mélancoliques. Pour vous faire une courte idée écoutez Take Me With You, orchestration luxuriante, joli vibraphone et cœur fragile, de la sur-variété comme on en fait plus.


jeudi 23 avril 2015

Mac DeMarco - Live on KEXP #10



Salad Days
The Stars Keep On Calling My Name
Blue Boy
Cooking Up Something Good
Let Her Go
Ode To Viceroy
Brother
Still Together


mercredi 22 avril 2015

Solitude de l'audionaute de fond (12)



13 avril 2015. Bon n° de Rock&folk que j'ai lu en parti à bord d'un Airbus qui a eu la bonne idée de ne pas s'écraser  contre une montagne qui ne lui demandait rien. Un papier de Patrick Eudeline consacré aux « bandes de rockers », quelques propos un brin nostalgiques de Dylan pour qui les « origines du rock » sont moitié blues ( Des violons arabes et des valses de Strauss qui s'accordent), moitié ploucs (le Hillbilly, l'alcool de contrebande qui rend maboul, des bagnoles à fond sur des chemins de terre). Il faut écouter les Delmore Brothers, les Stanley Brothers, Gid Tanner et ses Skillet Lickers, ce genre de gars-là…

14 avril 2015. J'écoute le jeune Art Pepper avec le Marty Paich quartet, de la souplesse, de la décontraction pour une musique précise et colorée (il faut  parfois savoir parler comme un représentant en tapisserie). J'écoute Paul Desmond (A Taste Of Honey) et c'est comme un rendez vous secret avec Audrey Hepburn devant l'une des vitrines de Tiffany's. J'écoute l'album The Jimmy Giuffre Clarinet (1956). Giuffre interprète un blues avec pour seul accompagnement le martellement de son pied (So Low). Il y a un autre tire où un célesta solitaire répond à sa clarinette (Deep Purple), une version de My Funny Valentine arrangée dans les limbes (Haut-bois, cor anglais, basson et basse…) Ce disque se mérite, un Himalaya de Jazz janséniste

15 avril 2015. Peter Case – Thank you St. Jude (2001) Voilà une belle chose pas compliquée ; enregistrée en trois sessions et un après-midi avec un violon une guitare en bois et des chansons pour tout matériel. Le meilleur de Peter Case ? Peut-être pas, ce n’est pas certain, le meilleur de Peter Case est globalement ailleurs, chez les Nerves, les Plimsouls, ces parangons Power pop musclés et pleins de tendons saillants. Là, l’acoustique primant, nous sommes plus détendus, pas avachis, mais reposés, d’une ostensible tranquillité devant des « versions » calmes et épurés ; des « versions » qui oublient la pop survitaminée, pour mieux se prendre les pinceaux dans les racines de la grande tradition américaine (country, blues, Dylan, tout ce que vous voulez…). On entend Case quasi yodeler, il le fait bien, pas aussi bien qu’un cow-boy perdu, mais presque aussi bien. Les chansons tiennent toutes seules, elles sont proches de l’os et paradoxalement elles ne semblent pas chercher un quelconque point de douleur. C’est finalement un disque très plaisant, très bien pour les débuts de printemps lorsque le soleil commence à descendre moins tôt. Rien de plus, rien de moins, c'est déjà beaucoup.

16 avril 2015. Duane Allman – An Anthology (1972) Sorti un an après son trépas inopportun cette compilation rassemble quelques uns des plus magnifiques gratouillis commis par l'ami Duane en tant que musicien de studio. On le retrouve derrière Wilson Pickett, Aretha Franklin ou Eric Clapton, il y est très à son aise, on le retrouve aussi derrière Boz Scaggs et John Hammond Jr, il y est plus que très à son aise, crotté, bouseux mais majestueux…

17 avril 2015. Ciel changeant, voilà quelques nuages. J'écoute Charles Brown l'un des plus beaux représentants de la tendance west-coast-blues, une magnifique plainte relâchée (Black Night). J'écoute Lars Gullin suédois toxicomane et jazzman, un saxophone baryton comme on en rencontre peu (Danny's Dream). Je regarde et j'écoute Hoagy Carmichael chanter Honk Kong Blues dans un vieux Hawks de dessous les fagots, je regarde une belle blonde platine et j'écoute Cliff Edwards chanter It's Magic dans un vieux navet au technicolor flamboyant.

18 avril 2015. Pauline Murray & The invisible girls (1980) Le casting est impressionnant, outre au gazouillis la mousseuse (et ex Penetration) Pauline Murray, on notera dans une sorte de farandole raide : Vini Reilly, Bernard Sumner et leurs courtes guitares crispées, Martin Hannett et sa grosse basse… un John Maher rescapé de l’onanisme foutrement adolescent qui tape sur ses peaux comme un vrai homme prodigue en testostérone… Le tout est produit par l’équipe de choc Factory, Chris Nagle en observateur distant et Martin (encore lui) Zero Hannett en facteur d’ambiance, il y a de pires souteneurs. Seul hic au passage, car il y a un hic, ce disque n’est que très occasionnellement agréable et reste pour l’essentiel anecdotique bien malgré la distribution.
Peter Coyle - I’d Sacrifice Eight Orgasms With Shirley MacClaine Just To Be There (1986) Plus qu’un magot caché, plus qu’un must oublié, ne cherchez pas une île, un quelconque filon, soulevez simplement les fagots, voilà. Peter Coyle -> oui le Peter Coyle bien peigné de Lotus Eaters -> Album solo, un titre génial : I’d Sacrifice Eight Orgasms With Shirley MacClaine Just To Be There, une chose gauche et dévoyée -> Il y a un autre album , un double : A Slap In The Face For Public Taste, encore plus machin tordu -> Le tout est introuvable ici -> En attendant vous pouvez vous fader la jolie scie, vous tailler la jolie guêpe sur The First Picture Of You ; une fois de plus…


vendredi 10 avril 2015

Psychogeographie indoor (57)



Plus ne suis ce que j'ai été,
Et ne le saurais jamais être.
Mon beau printemps et mon été
Ont fait le saut par la fenêtre. 
Clément Marot (1496-1544)


1.


18 octobre 2014.- Good weather, indian summer (26 °C) Après le kitsch pavillonnaire, les nains de jardins et l'usage des ruines, Jean Yves Jouannais s’intéresse aux barrages de sable. Bel opuscule, du Sebald enjoué et plus aérien que tenaillé et l'une des petites parties d'un ensemble assurément moins badin, cette Encyclopédie des guerres qui pourrait être sa « vraie grande œuvre ». Comme je suis assez sans mes mots, je laisse volontiers parler l'auteur : « Les châteaux de sable, je finis par les envisager comme des livres que l'on aurait pu écrire, ou pas, ou particulièrement, qui n’auraient pas eu d'ambition artistique, hormis celle de répondre à une obsession, de s’accorder à elle. Les châteaux de sable n'ont pas d'auteur, ils sont des matériaux conducteurs de fable, toujours exactement la même, ont pour vertu cardinale de mesurer du temps, et non seulement font la guerre, mais sont la guerre. Si les châteaux de sable n'avaient pas été la littérature, j'aurais trouvé, dans la littérature justement, mille références aux châteaux de sable. La preuve de l'identité des deux phénomènes, c'est que la littérature avait su traiter, et avait eu le temps de le f aire, de tous les aspects, réels, objectifs, comme fantasmés et imaginaires de l'épopée humaine, à l'exception des châteaux de sable, C'est peut être aussi la raison pour laquelle ma phrase continuait de ne pas me déplaire, parce qu'elle demeurait unique sur cet aspect de la castellologie. S'il m'était venu à l'esprit de compiler les savoirs contemporains comme ancestraux sur cette discipline, mon encyclopédie n'aurait compté qu'une seule page, composée elle-même d'une unique citation dont j'aurais été l'auteur. »

19 octobre 2014.- Du soleil, des nuages ensuite. (25 °C) Fini le traité de castellologie littorale de Jean Yves Jouannais. En définitive un joli patchwork, des bouts encyclopédistes, d'autres  autobiographiques, de la critique d'art, de la fiction en contrebande (ce Félicien Marboeuf, inventé correspondant épistolaire de l'ami Proust), de la grande Histoire et de petites histoires (ce Japonais oublié, ces enfants soldats…) Paradoxalement malgré le côté épars de tous les tissus, bannes et étoffes, il y a de la cohérence, les coutures tiennent le patchwork est presque réussi.
Rien (ou presque) : Sans attirance particulière quant aux innombrables choses de la vie. Je disparaîtrais dépourvu de la moindre ostentation et avec un flegme qui ne bouleversera personne.

20 octobre 2014.- Tiédeur vaguement humide, hors de saison. (26 °C) Fausse bataille d'Hernani autour d'un « plug anal  gulliverien » : l’époque est décevante.
Ramollir c'est rendre mou ce qui est trop ou très dur. Comme il me semble ne jamais avoir été très ou trop dur, je ne peux donc pas dire que je me ramollis plus que cela. Je dirais plutôt que je m'attendris, dans le sens où je deviens moins consistant, un peu à l'image d’une viande récemment morte qui devient moins ferme lorsqu'un cuisinier vétilleux à la bonne idée de l’attendrir avec une pointe de vinaigre. Allez savoir, ainsi attendrie pourrais je peut-être courir plus facilement hors de moi-même, loin d'un monde intérieur devenu terne, pesant et sombre… libre de me perdre en frivolités diverses et variées. (Bo / Cathal Coughlan - Goodbye Sadness)

21 octobre 2014.- Ciel, plutôt nuageux. (22°C) Je serais bientôt en bord de ravin, cette excavation longitudinale, ce vide sombre pâle et rond dans lequel j'aurai peu de peine à vouloir choir.
En attendant, je suis encore chez Cioran, dans ses cahiers, presque un autre précipice. (Bo / The Jam - That’s Entertainment)

23 octobre 2014.- Des nuages, du vent, de la fraîcheur insidieuse (12°C) Une âme sautillante doit savoir récolter le bien-être qui lui passe à portée de main, c'est pourquoi je tente de cueillir les vives effusions de joie qui m'entourent… en vain. Lu trois pages de Paul Morand, la préface qu'il avait consacrée au Lys dans la vallée de Balzac : « le Lys dans la vallée c'est la princesse de Clèves du romantisme, c'est l'attachement au devoir dans les ruines d'une courte existence… » .

24 octobre 2014.- Beau temps frais. (14 °C) Le fripon est un coquin qui lorsqu'il ne dupe pas sans scrupule son voisin, sait le voler adroitement. Quand le fripon passe la rampe de l’authentique crime sanglant et de l’homicide tapageur, il se transforme alors en pendard. Le pendard évolue généralement un peu au-dessus du sol où il flotte à hauteur de pendu. Rien de bien étonnant puisque c'est son destin que d'être pendu.
Lu un long article consacré à Charles Sobhraj, franco-oriental trucideur de hippie en goguette. Un drôle de fripon qui finira pendard.
Demain  nouveau  Modiano, non sans inquiétude. (Bo / The Kinks - The Village Green Preservation Society)

25 octobre 2014.- Du gris, du mordoré, l’automne est là (18°C) Ce matin inaugurant le Musée Picasso, François Hollande affirmait sans crainte que « l'on ne construit rien sur la nostalgie ». Il y a quinze jours le même François Hollande faisait l'éloge du tout nouveau Prix Nobel de Littérature, Patrick Modiano. Hors qui y t-il de plus construit sur la nostalgie que l’œuvre de ce dernier ? Je pose la question tout en sautillant modérément.
En parlant de nostalgie et de Modiano, je lis Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier. Le titre est modianesque, le livre encore plus, tellement modianesque que pour un peu on pourrait croire lire un pastiche. Tout est là et même presque un peu trop : flottement mémoriel, individus louches, bouts autobiographiques brumeux...

26 octobre 2014.- Ciel bleu pâle, fraîcheur de saison (15°C) Mes craintes concernant le nouveau roman de Patrick Modiano se sont confirmées. Il ressemble bien au pastiche que j'évoquais hier. Le décor est en place, le brume mémoriel tombe mais le charme n'agit pas comme si Modiano était dorénavant en roue libre, ou pire encore, déjà presque au-dessus de lui-même. Dans la foulée lu Congo, court récit d'Eric Vuillard consacré à la conférence de Berlin en 1885 et à la terrifiante prise de possession du Congo qui s'en suivit. Rien d'une colonisation un pillage en règle commandité par un Roi des Belges plus féru de sa propre importance que de tout autre chose. Dans un style parfois épique, souvent émue, Vuillard évoque la fatuité des partageurs berlinois, les massacres en bord de fleuve boueux, cette forêt dans lequel de piteux proto Kurtz commanditent moult trépas à l'unisson, il n'oublie pas non plus les morts, les victimes, car à tout bon colonisateur il faut des victimes : « celui qui tire des coups de fusil doit, pour justifier l'emploi de ses munitions, couper les mains droites des cadavres et les ramener au camp ».

27 octobre 2014.- Ciel globalement nuageux. (15°C) Il est 18 h la nuit est déjà presque noire, merci Giscard, merci la France ! Nothing else.

29 octobre 2014.- Du soleil, pour rien. (17°C) Retour dans les reportages de Jean Rolin. Aux alentours de l'ex Mésopotamie, l'Iranien tu l’Irakien, l’Irakien tu le Kurde, le Kurde tu l'Assyrien, l'Assyrien ne tu personne, il faut dire que c'est un très vieux chrétien. En future ex-Yougoslavie, le Serbe regarde le Croate de biais, le Croate regarde le Bosniaque de travers, l’Albanais regarde un peu tout le monde avec un air anguleux. Bientôt on cessera de se regarder de guingois pour mieux entamer une sanglante et rectiligne algarade.
à lire : La littérature nazie en Amérique de Roberto Bolaño.

30 octobre 2014.- Beau temps (17°C) Travaillé nuitamment. En conséquence, passé l'essentiel de ma journée entre sommeil, sieste prolongée et état semi-flottant. Néanmoins, entamé La littérature nazie en Amérique de Roberto Bolaño. Bizarrement, mon premier Bolaño. Pour l'instant assez bien, faussement sérieux et vraiment pince-sans-rire. Des écrivains imaginaires, leur notice biographique, de fausses vies croquignolettes entre engagement compromettant et tangible horreur homicide et la preuve que la littérature souffle d'un peu partout y compris depuis la supposée ignominie.

31 octobre 2014.- Labeur. Beau temps dans le genre été indien. À quoi bon ? La nuit tombe à 17h30. (20°C) Tournant sans gaieté autour du morne agrégat du quotidien, la déconfiture me guettant, il faudrait que je me trouve des ailleurs, que je décanille d'un pas léger, la tête en l'air… Lire Sein de Ràmon Gómez de la Serna. (Bo / Dave Berry - This Strange Effect).

1 novembre 2014.- Ciel partiellement nuageux, humidité 60 %, vent 8km/h (20°C) Un peu malade. Encore dans la Littérature Nazie de Bolaño. À force de répétition, un peu d'ennui.
Pour le reste si je suis radical, c'est dans apragmatisme. (BO / Karen Mantler - My life is hell )

2 novembre 2014.- Soleil embrumé (18°C) Finalement, beaucoup aimé la Littérature nazie de Roberto Bolaño . Quelques menus défauts, un côté certainement répétitif, mais une grande qualité : ces grandes baies ouvertes sur le territoire de la fiction, cette façon de sautiller par-dessus la modernité, cet oubli du roman-roman.
Poursuivi par la lecture de Rose poussière de Jean-Jacques Schuhl, « livre culte » que je regarde de biais depuis un certain temps déjà, il faut se méfier des « livres cultes », mais que j'ai décidé de lire comme ça au débotté. Globalement assez à mon goût, très vieille avant-garde en bien, pop-art et patchworkesque avec un beau style qui pourrait presque contrarier le « projet initial » : écrire un livre un brin impersonnel comme Warhol pouvait produire des tableaux un brin impersonnels. Au milieu de ce joli fatras plein d’électricité, de falbalas et de jeunes filles pâles ce passage qui résonne dans un drôle d'écho avec un fait divers tout autant récent que tintamarresque : «  Le combat fabrique une zone d’échange où les ennemis se fondent. Les armures et les boucliers d’Alexandre Nevski, les lances de Paolo Uccello évoquent – de quelque camp qu’elles soient – quelque chose d’autre. Au moment où ils échangent des coups, où ils avancent et reculent doucement dans leurs inhumaines et collectives parures, les gardes mobiles barrent le quelque chose d’autre et sont ce quelque chose d’autre. Autant qu’un mouvement de répulsion contre l’autorité, leur apparition dans les rues provoque le trouble attrait du monde cruel et désindividualisé qu’ils (pré)figurent. Il y a entre les ennemis d’étranges complicités… »

3 novembre 2014.- Bruine (14°C) Guère d'entrain. Quelques pensées de Joseph Joubert. Lire les Chroniques d'un patachon de Pierre de Régnier

4 novembre 2014.- Pluie diluvienne, nous y sommes (10°C) Cioran, Cahiers. Ces quelques mots banals mais qui on toute la force de l'évidence : «  Règle générale : un auteur commence à être reconnu et fêté au moment où il n'a plus rien à dire. L'avènement de la gloire coincide avec celui de la stérilité » (Bo / La clinquante nursery de Syd Barrett).




2.


6 novembre 2014.- Soleil et quasi froideur (9°C) Morose, maussade, renfrogné, chagrin, grimaud ou tout comme. Pour tenter de sautiller ne serait ce qu'un tout petit peu je me dirige vers ma bibliothèque. Je choisis le 149e volume qui s'offre à mon regard en partant de la gauche. Le hasard faisant bien les choses il s'agit de l’Air et les songes du père Bachelard. Page 149 il y est question de la méthode Desoille, un bidule psychothérapique recommandé pour se débarrasser des moult soucis conscients qu'un quidam, ordinaire ou pas, peut rencontrer. Chez Wikipedia : « Le sujet allongé se met en état de relaxation et ferme les yeux pour créer un scénario imaginaire dont il est lui-même le héros principal (ou unique). Le thérapeute intervient parfois pour faire préciser une partie de l'espace imaginaire ou une bifurcation possible du scénario. Dans une autre phase du travail, il est proposé au sujet de rédiger un compte rendu écrit qui pourra servir de support à une séance en face à face pour explorer la signification du scénario. Bernard Auriol utilise une variante qui consiste à proposer la création d'une série de dessins (sorte de story-board) en lieu et place du compte rendu écrit. De même peuvent être suggérées la production d'oeuvres sculptées, installées ou picturales, en guise de compte rendu. Ces procédés développent l'aspect sublimatoire lié au rêve éveillé et à l'imagination active en général. Chez l'enfant, le protocole est modifié en ce sens qu'il dessine, les yeux ouverts, assis à une table la BD du scénario qu'il imagine ».

Pour le reste, entamé un joli pavé : Please Kill Me : L'histoire non censurée du punk racontée par ses acteurs, le début est très bien : « LOU REED : Tout seul. Personne à qui parler. Viens un peu par là que je te cause… On jouait ensemble il y a des années, dans un appartement à trente dollars par mois, on avait vraiment pas un rond, on bouffait des flocons d’avoine matin et soir et on faisait des dons du sang pour se faire offrir un petit-déj, entre autres, ou encore on posait pour des tabloïds hebdomadaires bas de gamme. Quand ma photo est parue, la légende disait que j’étais un maniaque sexuel qui avait tué quatorze enfants et filmé les meurtres pour les projeter dans une grange du Kansas à minuit. Et quand ç’a été le tour de John Cale, la légende disait qu’il avait tué son amant parce que celui-ci était sur le point de se marier avec sa sœur, et qu’il ne voulait pas que sa sœur épouse un pédé. » (Bo / Ronnie Bird – Sad Soul).

7 novembre 2014.- Ciel dégagé, fraîcheur latente (11°C) Please Kill Me : Warhol, factory, Eddie Sedgwick, Velvet, méthédrine, fouet, Gerard Malanga, back room, vaseline, Lou Reed… Des débuts prometteurs.
Il est des jours où le désœuvrement vous fait faire de drôles de choses. Tenez, pas plus tard qu’ aujourd’hui je me suis permis de diviser le nombre de mon année de naissance par le chiffre de mon mois de naissance ! Ce n'est pas rien, le résultat est étonnant, figurez-vous que 1966 divisés par 4 font 491,5 ! D'aucuns avec un tel résultat n'auraient pas fait grand-chose de bien captivant, je me suis quant à moi dirigé vers mon auguste bibliothèque et j'ai lentement recherché le 491e volume en partant du haut. Croyez-moi ou non, mais ce 491e volume s’est avéré être un petit bidule moderniste de George Perec ! De surcroît pas n'importe lequel de ses petits bidules modernistes : Les Choses ni plus ni moins ! Un peu étourdi par un hasard tout autant élégant qu’oulipesque, j'ai ouvert le volume page 10 (je suis né le dixième jour d'avril 1966) il y était question d'un petit fauteuil canné, d'un téléphone, d'un agenda de cuir, de choses et d'autres…
N.B. Le délicieux Evelyn Waugh est mort le 10 avril 1966.

8 novembre 2014.- Brume et soleil (11°C) Malade, Estomac, en conséquence guère d'appétence sautillante. Toujours dans Please Kill Me, pas un parangon de grande littérature, mais un parangon de croquignollerie. Il faut dire que les débuts du Punk (américain) ne sont quasiment que croquignollerie. La cour warholienne, la « scène » de Detroit, les MC5 de Wayne Kramer et les Stooges du petit James Osterberg, les Doors et leur roi bouffi. En dehors de l'électricité, du cuir, de la sexualité débridée et des petits cachetons pris au débotté, presque un point commun entre tous ces gens : la marmoréenne Nico … Elle passe de Lou Reed à John Cale, de John Cale à Jim Morrison, de Jim Morrison à Iggy Pop ; c'est une ronde raide à elle toute seule.

9 novembre 2014.- Repos. Pluie, pluie, pluie, pluie, pluie, pluie, pluie, pluie, pluie, pluie, pluie, pluie, pluie (10°C) Still sick. Please Kill Me, again. Saga des Stooges, marigot underground new-yorkais, Patti Smith et Robert Mapplethorpe, débuts punks… Le tout fortement croquignolet, frôlant plus qu’ à son tour le burlesque entre travestis, paillettes, flaques de vomis et seringues égarées. (Bo / Iggy Pop & the Stooges - Raw Power)

10 novembre 2014.- Nuages et bruine. (12°C) Perclus de douleurs diverses et variées, certainement l'un des grands avantages du labeur.
Si j'aime tant me bastonner moi-même, c'est parce que cela me permet de pourvoir à mon inlassable besoin d'être estourbis. Je marche alors de guingois, la tête dans les étoiles, je suis presque heureux.
Pour le reste toujours plongé dans le pavé Please Kill Me, une vraie armoire à croquignolerie prête à vous assommer en bien : «  Allen Ginsberg m’a prise pour un joli garçon et il a essayé de m’emballer, alors je lui ai répondu : “REGARDE LES NICHONS, ALLEN ! T’AS PAS FAIT GAFFE AUX NICHONS ! » (Patti Smith) (Bo / Blue Oyster Cult - (Don’t Fear) The Reaper).

13 novembre 2014.- Beau temps frais (12°C) L'époque étant ce qu'elle est une troupe d'esprits finauds s'est permis d'inventer au débotté une « journée de la gentillesse ». Ainsi aujourd'hui sur l'habituel et désolant agrégat de vulgarité formé par tout semblant de société flottait un drapeau douceâtre, mielleux et sucré, le drapeau des patelineurs et autres patte-pelus. Quant à moi, je me suis repu de bougonnerie.

14 novembre 2014.- Ciel dégagé (11°C) Not in the mood. Drôle de blague que la vie. Une suite d’aberrations, de méprises, de maldonnes brinquebalantes ; presque une escroquerie. Du côté des livres, toujours plongé dans Please Kill Me. Les débuts de Television (le groupe) ; les tee-shirts déchirés de Richard Hell, les « passes » de Richard Lloyd, jadis je confondais les deux.

15 novembre 2014.- Brume, pluie, nuit précoce (11°C) Ennuyé et légumineux, pas d'envie. Encore dans Please Kill Me. Toujours centré sur l’anecdote cintrée, mais toujours très bon. Wayne County et ses algarades de fausse fille vraiment ébouriffée, Nancy Spungen comme pont sordide entre punk américain et punk anglais. Un mouvement de moins que rien, de petits blancs fiévreux de toxicomanes en goguette de drag queen musculeuses, qui comptera beaucoup. (BO / Television - Little Johnny Jewel).

16 novembre 2014.- L’hiver est presque là, j'ai échangé mon Mondrian contre un Gauguin. (10°C)
Le punk de base est un petit gars qui trépasse généralement avant l'heure légale. Ainsi la fin de Please kill Me n'est qu'un long requiem qui tournicote autour de ceux qui sont tombés aux « champs d'honneur » : Nancy Spungen et Sid Vicious, Stiv Bators et Johny Thunders, Jerry Nolan… d'autres. Le livre était formidable, il devient très émouvant, ce n'est pas rien, c'est même plus que pas rien…

3.



17 novembre 2014.- Ciel plutôt nuageux, des averses (10°C) Être à côté, sans exagération ni hyperbole, dans une ironie plaisante et sentimentale, une ironie inachevée tournicotant aimablement autour d'un autrui compère ; c'est ce que j'appelle UMOUR.
Lire Joë Bousquet (Traduit du silence), Pierre Bergounioux (Le matin des origines), Georg Trakl (Œuvres complètes). (BO / Young Marble Giants – Wulitzer Juxebox).

18 novembre 2014.- Nuages, pluie, nuages, pluie, nuages, pluie, nuages, pluie… (10°C)
Je ne suis plus qu'un sac d'amertume ranci par le labeur. Nothing else.

20 novembre 2014.- Brume et semi-frimas (10°C) À l’alternat entre les Cahiers de Cioran, les Carnets de Pierre Bergougnioux et la correspondance de Guy Debord
Rien (ou presque) : Rivé sur la quintessence, cloué sur la « moelle » des choses, crucifié sur du substantiel, me voilà dans une position bien inconfortable.

21 novembre 2014.- Les quelques brumailles matinales derrière nous, belles et larges soleillées (15°C) Rien  lu ou presque. Confusément malade, quasi effondré sur moi même, trop de pesanteur, peu de légèreté, rien pour moi. Lire Paris ne finit jamais d'Enrique Vila-Matas.

22 novembre 2014.- Ciel dégagé (12°C) Paris ne finit jamais de Villa-Matas. Très bien, pas un livre de souvenirs, pas un essai, encore moins un roman-roman. Plutôt les trois, les trois dynamités avec de beaux pains d'umour. Aller-retour entre le Paris littéraire du milieu des années soixante-dix et le Paris contemporain. On folâtre à la terrasse du Café de Flore, on croise Sollers, Barthes, Perec, on croise Marguerite Duras, c'est elle qui loge Villa-Matas dans une chambre de bonne. On croise surtout Hemingway, il a beau ne rien à voir  avec ceux cités précédemment son ombre est massive.

23 novembre 2014.- Repos. Journée printanière, mais bien inutile, la nuit tombant aux alentours de 16h30. (18°C) Au mitan de Paris ne finit jamais (c'est un livre assez court, je dois lire lentement). Le charme de Paris au milieu des années soixante-dix. Le marigot underground, le tournage d‘India Song, d'hypothétiques prostituées déguisées en premières communiantes, le visage parfait de la jeune Isabelle Adjani, la totale féminité de Marie-France… Au-delà des souvenirs, des anecdotes, quelques belles interrogations sur la littérature, la modernité et la nécessaire implosion du roman-roman.(Villa-Matas dézingue un peu le magnifique Au-delà du fleuve et sous les arbres de l'amiral Hemingway, je pense qu'en l'occurrence il a un peu tort). (BO / Bedhead – WhatFunLifeWas).

24 novembre 2014.- Soleil et nuit précoce (16°C) Un thé indien, du labeur,quelques pages de Cioran, ses Cahiers… Un peu d'ennui, il faut bien vivre après tout.
Rien (ou presque) : L'usage judicieux de l'euphémisme me semble être l'un des combles de l'élégance ; un petit bouclier gracieux, un signe de civilité, de douceur et d'ironie face à l'indicible qui plus qu'à son tour tente de nous saisir avec ses grandes pattes véritables.

25 novembre 2014.- RIEN.

26 novembre 2014.- Petite pluie (13°C) D'une humeur inopinément sautillante je ricoche sans faux fuyant, dans de très petits bonds comiques, vers un ailleurs que le commun des mortels pourrait aisément imaginer radieux. Cette allégresse ne durera certainement pas, je vais m'en contenter.

27 novembre 2014.- Grands nuages anthracites sauvagement déchirés, petite bruine (12°C)
La lumière de novembre est si tenue, incertaine et faible que l’on se demande si elle n’existerait pas uniquement dans le but sournois de faire trépigner une nuit qui attend son heure légale impatiemment.
Quelques lignes de Robert Walser, une lettre de Guy Debord (une exclusion), deux trois autres petites choses plus ou moins sautillantes.

29 novembre 2014.- Nuages et froideur. L’hiver est presque là (6°C) On pourrait voir Paris ne finit jamais comme un antonyme de Paris est une fête, c'est une éventualité fortement tangible. En tous les cas, la fin est fichtrement mélancolante et guère festive : suicide du père Hemingway, mort de Marguerite D, presque de l'émotion, c'est le corps de l'un et l'esprit de l'autre qui s'envolent.
En parlant de corps et d'esprits qui s'envolent, entamé Traduit du silence de Joë Bousquet. Bousquet apragmatique par contrainte, encombré par un corps si inutile, mais quel beau style, quelles belles phrases.
D'autre part entamé La voiture de pompier disparue de Maj Sjöwall et Per Wahlöö , le Roman d'un crime épisode cinq. Comme toujours chez ces auteurs (un couple de communistes non raides) un humour gris tournant autour de la sociale démocratie, le côté terriblement moderne de l'intrigue et de ses arpents procéduraux. Et puis encore une histoire de corps : corps calcinés, corps des policiers quadragénaires, corps d'une épouse au pyjama ouvert laissant apparaître une toison pubienne d'un noir de jais, corps d'une autre épouse moins affriolante : « Mme Melander était une femme pingre, disgracieuse, taillée à coups de serpe, haute de 1,75 m, dotée de pieds plats et de gros seins pendants. Elle avait cinq ans de moins que son époux et s’appelait Saga. Melander la trouvait très belle. Depuis plus de vingt ans. En fait, elle n’avait guère changé pendant tout ce temps ; elle pesait toujours 82 kilos, chaussait toujours du 44 et la pointe de ses seins était toujours pareille : petite, rose et cylindrique. Une gomme au bout d’un crayon neuf. »


To be continued