samedi 18 août 2012

Game Theory - Lolita Nation (1987)


La canicule est là, plantée, suintante, visqueuse comme un animal tropical peu recommandable. Il y a pourtant des gens qui éprouvent le besoin de courir dans une telle tiédeur. Tiens ce matin j’ai croisé pas moins de quatre « joggers », ils étaient pour l’essentiel quadragénaires, bedonnants et nimbés d’une petite cohorte de certitudes quant aux bénéfices de la course à pied pratiquée parcimonieusement et dans des conditions globalement raisonnables. Comme les conditions offertes par cette matinée caniculaire n’étaient pas raisonnables du tout, je suis resté dubitatif tout en les observant avec la paume de la main droite judicieusement posée sous le menton. Mes quadragénaires bedonnants suaient tout en ahanant comme des buffles que l’on amène à l’abattoir, les concernant je me suis pris à imaginer des complications, des infarctus du myocarde, des collapsus divers et variés, bref que du réjouissant. Tout cela pour dire qu’il fait bien chaud et qu’il ne faut pas compter sur moi pour pratiquer la moindre activité physique que ce soit. Il fait tellement chaud que je ne suis même pas certain de pouvoir écouter de la musique, c’est vous dire ! Je ne sais pas, tiens même une chose aussi pimpante pop et Paisley Underground que le troisième album de Game Theory, Lolita Nation prend des airs tour à tour moites et brulants. Pourtant dans mes souvenirs c’est un disque agréable et frais comme son beau patronyme nabokovien, mais rien n’y fait je ne VEUX pas faire d’efforts ! Sortir le disque de sa pochette, enlever la poussière accumulée sur le celluloïd (c’est un vieux double vinyle datant des années 80), ouvrir le couvercle du « tourne-disque », déposer mollement le diamant sur le sillon, non c’est vraiment trop ! Je n’écouterai donc pas ce disque. Je peux par contre vous en parler un peu si vous le voulez bien car je m’en souviens vaguement et puis la parole demande moins d’efforts. On peut parler tout en restant allongé sur un canapé, voire un hamac, on peut parler en dormant, on peut parler en rêvant… Game Theory était un petit groupe tout en était une grande cause perdue. Un petit groupe, car Paisley underground et donc non crucial, grande cause perdue, car au sein de ce mouvement un peu artificiel, mais néanmoins sympathique, ils n’étaient pas les derniers à avoir la capacité d’inventer des chansons fraiches romantiques et acides tout à la fois. Dans mes souvenirs Lolita Nation est peut être un disque visant trop haut, il déborde trop, ses 27 titres sont un brin étouffe power pop, mais il y dedans une indéniable somme de pépites, des chansons merveilleuses sorties de la cuisse droite de Big Star (The Real Sheila, Chardonnay, Andy In Ten Years), des expérimentations avant-gardistes très bien mal venues, des histoires moroses pleines de rumination toutes remarquablement bien chanté par l’impeccable falsetto de Scott Miller. Bon il faut que vous sachiez que c’est le disque avec lequel il ne faut surtout pas découvrir Game Theory, je vous en parle parce que c’est un disque que j’ai beaucoup aimé il y longtemps. Je vous en parle parce qu’il fait trop chaud pour que je vous parle de quoi que ce soit d’autre. Je vous en parle et je vais bientôt cesser de vous en parler, mes yeux se ferment, une douce torpeur me saisit, je pique du nez et mes mots se noient. Voilà je dors, voilà je rêve. Dans le creux d’un canapé écru, je rêverai. Et tout le reste est caniculaire.



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