jeudi 13 novembre 2008

Jesse Belvin - Mr.Easy (1960)



Le destin tragique de Mr. Easy, triste histoire, mort à 28 ans, sur le bord d’une route, assassiné en couple par une automobile bilieuse, - ne conduisez-pas, il y a trop de risques -. Jesse Belvin un autre Sam Cooke un autre Otis Redding, plus secret, plus ordinaire, moins mythique, venant avant les autres, mort avant… Plus compliqué aussi, Belvin un songwriter prolifique… mais dilettante, très dilettante... tellement dilettante ; il écrit des chansons, des dizaines et des dizaines qu’il ne monnaye pas plus que 100 dollars pièce, des chansons écrites en cinq minutes, dans une voiture, sur un banc, dans la cuisine… allez savoir !
Et puis lassé d’être un vague artisan en équilibre sur les bords d’une industrie bien réelle, il saute, il chante, oui c’est un chanteur, un vrai, un crooner magnifique, avec une voix magnifique : « Goodnight My Love » et dans le fond un pianiste âgée de 11 ans, l’incontournable Barry White, « Guess Who » merveille écrite par sa femme Jo Ann, plus qu’un cadeau, un phénomène en suspension, plus qu’un one-shot doo-wop non une merveille, une vraie . Il chante et chante encore (procurez-vous les compilations) il est Mr. Easy, un type cool, un vrai…
Mr. Easy c’est justement le titre de l’un de ses seuls vrais albums, un album que les esprits chagrins trouverons peu représentatif : trop crossover, trop blanc, trop joli… trop Sinatra, trop Nat King Cole et Billly Eckstine … pas assez Sam Cooke, pas assez noir, pas assez non-produit… Les esprits retors ravalent bientôt leur mauvais chagrin , c’est un disque formidable, un vrai disque de studio comme il y a des vrais films de studios (un disque RCA, comme il y a des films RKO) superbement arrangé par Marty Paich, avec Art Pepper au saxophone, Jack Sheldon à la trompette, deux magnifiques souffleurs . Oui une merveille, une vraie, un fil d’or où Jesse Belvin est conscient de ses propres limites, oui il sait que sa voix ne sera jamais aussi riche que celle de Sinatra,qu’elle ne volera pas comme celle de Sam Cooke, oui il le sait, alors il l’utilise à sa juste mesure cette voix, veloutée expressive dans « Blues In The Night », duveteuse sur les cuivres « In The Still Of The Night » nonchalante et dans la soie « Makin' Whoopee » toujours distante mais dans l’émotion, comme dans cette belle version de « The Very Thought Of You », un voix qui pourrait vous faire pleurer sans pouvoir elle-même pleurer, tout est là, c’est le secret.
Jesse Belvin ne pourra pas écouter ce disque qui ne sortira qu’après son bien inopportun trépas automobilistique. Sam Cooke signera chez RCA, il y aura d’autres disques, superbement produits, superbement chantés, il y aura « A Change Is Gona Come » cette pierre angulaire, mais il ne faut pas oublier les premiers tailleurs de pierres…



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