dimanche 20 avril 2008

Le « croquignolet » du jour - Vince Taylor



« In hoc signo vinces »

Ne jamais oublier, anglais, anglais que j’étais.. Fils du blitz avec la Luftwaffe dans le ciel. Mon frère se battait dans le ciel, pilote dans la RAF mon frère, un homme, un vrai. Moi en bas gamin avec les ruines, et mon frère en haut… Anglais que j’étais… Après en 50 toute la famille a filé de l’autre coté, loin des ruines, direction New Jersey. Quatorze ans et vlan ! L’amérique. Un jour la-bas je sauve une fille de la noyade et je deviens, par hasard, maître nageur. Joli métier. Je chante au bord de la piscine, et les filles tombent ! Elvis sombre, peigne et maillot de bain, un putain d’archange anthracite au bord de l’eau. Apres en 56 ma sœur part pour Hollywood et toute la famille suit. Pas une bonne idée, ma sœur c’est une actrice imbuvable. Alors c’est moi qui fais le métier, je passe dans le fond d’une dizaine de westerns. Pas mon truc non plus, acteur, mais de la présence comme on dit. Même dans le fond, une ombre, anthracite que j’suis . En fait la-bas aux states, je veux être pilote comme mon frère, un homme un vrai. Je passe le brevet, tout va bien, et vlan ! Un jour, je rate un putain d’ atterrissage… je m’écrase. Putain de miracle, je suis toujours vivant, corps intact, j’ai un corps trempé dans la vie !
18 ans je suis chanteur, je chante sur les parkings, je chante pour la radio. Un soir de concert je me bas avec des catcheurs, les doigts cassés par des putains de catcheurs ! 19 ans je retourne en Angleterre. Je suis américain, j’ai l’accent yankee, je chante, j’ai un manager ! Un jour dans la vitrine d’un magasin, une combinaison de ski en cuir noir brillant. C’est le début du bordel, de tout le truc. Gene Vincent me copie, un putain de carbone anthracite Gene Vincent ! Il portait des vestes longues, un plouc en veste longue, et le voilà en cuir, salaud ! J’admire beaucoup Gene Vincent mais je suis surtout l’ami de sa femme ! Tout d’un coup me vl’a le prince des Teddy Boy, cuir noir, grosse chaîne en or. J’ai une épouse, un gosse et un contrat avec une maison de disque. Pas longtemps, pas de succès, divorcé, ma femme faisait des strip-teases dans mon dos. Déprimé je retourne aux Etats-unis, encore plus déprimé j’en reviens bien vite, il n’y plus de rock’n’roll aux Etats-Unis ! C’est le règne des bébés roses teen-idol.



Angleterre à nouveau. Tout recommence. Du mascara dans les yeux en 60 c’est la grande tournée avec Gene Vincent et Eddie Cochran. La tournée fatale pour Cochran, mort, accident de taxi, couic, un de moins ! Après c’est les Français, je suis récupéré par les Français, Barclay, Eddie Barclay ! Les chaises cassées, les blouson noirs… La meilleur époque après celle de « Brand New Cadillac » . La coupe internationale du Rock’n’roll, je l’ai emportée devant Gene Vincent et les Blue Caps, Eddy Mitchell et les Chaussettes Noires, Dick Rivers et les Chats Sauvages et Dany Logan et les Pirates… L’Olympia, la Nuit de la Nation, les chaises cassées, les putains de chaises cassées ! Le concert dans les arènes de Madrid devant 30 000 personnes. Le gars qui avait gagné contre le bull, à l’entracte de la corrida, il se promenait avec les oreilles du bœuf à la main et comme il ne savait pas quoi en faire, il me les a passées et j’ai chanté dans l’arène en agitant les oreilles, ils sont tous devenus fous ! Ca, c’était la meilleure époque ! J’ai eu Brigitte Bardot, Sophie Daumier et Hélène April, le top model définitif des sixties. Sophie Daumier, elle habitait dans un hôtel en face du mien. Un jour j’étais avec elle dans sa chambre, son type est arrivé avec un couteau à la main. Je me suis battu avec lui et comme j’ai gagné, elle est restée avec moi. C’est là qu’on est allé au Club Saint Hilaire, j’ai rencontré ce couple qui voulait m’emmener chez eux pour que je dévirginise devant eux leur fille de quinze ans. Je leur ai dit « excusez-moi, mais j’ai déjà un problème avec un mari qui a un couteau », rien à faire, il a fallu que j’y aille, que je me mette dans son lit, elle avait même pas quinze ans… J’ai eu aussi ce « problème » avec deux filles, « j’ai pas violé les deux filles : c’est parce qu’elles ne voulaient pas faire l’amour avec moi ». Après, avant ? Je sais plus bien, j’atterris à Hambourg, au Star-Club, sans musiciens. Je recrute un backing-band, c’était les Beatles ! Le patron du Star-Club un bandit, un vrai mafieux avec un flingue. J’achète un flingue moi aussi. C’est là dans ce magasin de flingues que j’ai croisé les Beatles. Je mélange encore les dates, je ne sais plus bien, en tous les cas après j’ai utilisé le flingue en oubliant une balle dans le barillet, résultat : main cassée, j’ai un corps trempé dans la vie…Après je me suis fait casser les dents par des Rockers à Saint Tropez. A l’époque je faisais de la boxe avec Alain Delon, j’étais très fort dans les bagarres, le deuxième souffle comme Cassius Clay. J’ai aussi fait six mois de prison en Angleterre pour port d’armes, il y avait Joe Frazier dans la prison, j’ai eu le temps de m’entraîner… Après tout ça je passe en vedette aux Folies Pigalle, un club de strip-tease. Pour faire plus viril j’ai une carotte dans le slip, un homme, un vrai… C’est le sommet de ma carrière mais aussi le début de la fin. Un an après c’est plus le temps des rockers, c’est celui des pop-stars les Beatles, les Stones, toute cette merde..
Deux ans plus tard le 23 mai 1965 je meurs une première fois sur la scène de la Locomotive, je suis le prophète Mathieu, j’évangélise la foule, je casse tout autour de moi, guitares, micros, batterie, les autres cassent bien des chaises. Après ce concert cataclysmique, je sors un disque mythique Vince...! Barclay me lâche comme une vieille chaussette (noire), je me roule par terre, c’est fini, je m’enterre. Je me cache dans une cave, je me laisse pousser les cheveux, je suis le Christ, un Christ sale, je reçois un faire-part annonçant ma propre mort. Un gang de chinois me précipite dans la Tamise, moi le maître nageur je suis sauvé de la noyade par des passants. Je disparais, on me retrouve à l’hôpital, chez les fous, on me retrouve chez les fous ! Je ne suis pas fou… Je ne suis pas fou… je suis un homme, un vrai… je veux être pilote dans la RAF !



Le 23 novembre 1979. ma fiancée d’Aubervilliers me dit « Je suis ta sœur en plus jeune » je deviens alcoolique. Pas plus d’une bouteille de whisky par jour, mais je fais attention à la marque, Quand je suis amoureux je bois moins de vin. Sauf le matin quand je me lève, je descends au bistrot boire un café au lait et ensuite… la sensation de l’alcool… l’odeur de l’alcool… je m’envoie un coup de rouge. Le premier coup de rouge du matin c’est comme un cercle vicieux. Là je suis à Macon, Saône et Loire, un vrai pays de rockeurs.. J’ai trouvé l’alcool, mais j’avais trouvé Dieu bien avant. Moi, Dieu J’y croyais pas mais un jour je faisais frire des côtelettes de porc au feu de bois et, spof, il y a eu une espèce d’éclat du ciel qui est venu et depuis, je vais à l’église. Enfin j’allais parce que maintenant je suis mort. Croyez-moi, il ne faut jamais se laisser mettre dans le cercueil ! De ma naissance à ma mort, j’ai toujours eu un corps trempé dans la vie, et à présent il ne trempe plus dans rien... la mort c’est pas bien. Moi qui étais un homme, un vrai, le Christ, un pilote de la RAF, vous pouvez casser les chaises en hommage, cassez les chaises c’est un ORDRE !

7 commentaires:

skorecki a dit…

il y a sur youtube une version couleur de vince t. qui chante shakin' all over qui n'est pas mal..
mais ça, c'est mieux
http://youtube.com/watch?v=hPxmPdDQtQA
(la vo de johnny kid and the pirates, un an plus tôt, en 1960)
johnny kidd (1935-1960).. toute ma jeunesse ...

Philippe L a dit…

Je me souviens aussi de cette photo avec Elvis, elle était très touchante.

Il y a une autre photo, Elvis et Jackson C Frank, Jackson C Frank et Elvis…

http://xs226.xs.to/xs226/08173/3343.jpg

skorecki a dit…

a real photograph or a collage, peut-être ...?

Philippe L a dit…

Je ne sais pas, peut-être, pour la photo. Jackson C Frank aurait bien rencontré Elvis à graceland. Il avait treize ans..

Sur Jackson C Frank deux trois choses, un vieux truc bancal, à réécrire…

http://novland.blogspot.com/2005/02/jackson-c-frank.html

skorecki a dit…

votre clip de jackson c frank est mort et enterré
here's another one, maybe the same (DIALOGUE):
http://youtube.com/watch?v=ArSBi7An3Jk
PS. moi je suis pas fou fou du blues blanc, tendance joe boyd, bert jansch, richard thompson .. et même nick drake: trop fragigle, trop joooliiiiii...
PS. ceci dit, dites moi si l'édition en deux disques de jackson c frank vaut le coup, je n'ai que le "simple"...

Anonyme a dit…

A voir aussi le formidable docu "A la mémoire du rock" de François Reichenbach : 1963, concert de rock n roll au palais des sports, ils sont tous là : 11 minutes orgiaques de jeunesse déchainée et ivre de bonheur.
Ca passe sur le cable en ce moment

Philippe L a dit…

Du côté de chez Frank :

CD 1:

- 01 to 10: 1965 Album "Jackson C. Frank"

- 11 to 12: 1965 Single (A & B sides)

- 13 to 21: 1975 studio tracks (13 to 17 first appeared on the reissue of the album, as "Blues Run The Game", in 1996)


CD 2:

- 01 to 06: 1994 studio tracks

- 07 to 15: 1997 home demos

- 16 to 22: 1960 studio tracks for an envisaged album entitled "Peaches & Crust"

Le CD 2 est assez loin du jooooooooliiii. Parfois anecdotique mais toujours monolithique et en phase terminale. Comme dirait l’autre : du blues blanc aux blouses blanches… Loin de l’évidence de « Milk and Honey. »