jeudi 27 septembre 2007

The Nits - Ting (1992)



« Mais non, ce n’est pas cela… je suis petit, voyons, provisoirement petit… je roule… je roule je suis une avalanche dans la montagne ! Je vous en prie, gens qui passez par là, soyez assez bons pour me dire qu’elle est ma taille, mesurez-moi ces bras, ces jambes. »

Franz Kafka - Description d'un combat


Alors on voudrait être un mélange douteux de Lester Bangs et d’Alexandre Vialatte alors que ne sera jamais rien si ce n’est un Robert Walser sans œuvre ou un André Suarès sans colère. On voudrait chercher la profondeur des choses car l’ironie ne descend jamais jusque-là, mais non il n’y a pas de profondeur il n’y aura jamais de profondeur, toujours de l’ironie, de la surface qui cherche de la profondeur, comme ça, une protection mais une protection dangereuse. Alors il y a bien ce disque des Nits, le plus beau, mais à quoi bon ? Des yeux lavés et ternis par les larmes, du feu dans la tête, des maisons sur la colline (et pas derrière, saloperie d’ironie), un piano, un accordéon et encore du feu dans la tête…. Satie avec du feu dans la tête… mais la discrétion des disques silencieux, ces disques qui font taire un univers trop bruyant et tous les fracas de la tonitruance.

Chut ! je me soustrais…

mardi 25 septembre 2007

Robert Pete Williams - Scrap Iron Blues



Robert Pete Williams, libre, enfin libre ou presque, ce type qu'il avait tué par erreur et pour de bonnes raisons et ces autres types pour le sortir de la prison à vie où il chantait de sombres litanies en « ré mineur. » Ce jeu abrasif, puissant dans ses faiblesses (dans le manque) et des choses qui s’échappent, qui flottent, même pas du ressentiment…

dimanche 23 septembre 2007

From Papeete to Teshupo (2001)

Un drôle de type vient me voir, il vient me voir tous les Dimanches, les autres jours il n’est pas là, il travaille. Comme il ne vient pas souvent ma barbe pousse. Elle ne pousse que sous mon menton. Le type qui vient me voir le dimanche, a les yeux cernés, il est bizarre. Il travaille dans un hôtel la nuit. La nuit il entend les gens faire des choses avec leurs corps, et il a des bonheurs coupables Il est tenaillé et glauque on l appelle Monsieur Hermès. Le jour il écrit des choses, mais très peu c’est une parure.. Un clandestin dans l’endroit où il écrit tous ces signes que les gens décodent et que moi je ne comprends pas. Ma barbe me gratte et j’ai perdu ma bicyclette, heureusement il n’est pas minuit et il ne pleut pas

Monsieur Hermes n'aime ni la pluie ni le verglas, par contre, il voit sans déplaisir les feuilles tomber, il aime patauger dans la boue liquide une fois l'averse passée, il aime respirer l'odeur de chien mouillé des passants, l'odeur acre, presque une odeur d'urine,des feuilles amassées en tas sur le bord des trottoirs. Le dimanche quand il vient me voir Monsieur Hermes sent tout ça, le chien mouillé une vague et tenace odeur d'urée …C'est pourquoi parfois je le reçois avec mon manteau enroulé autour de ma tête. Je l'écoute et des fenêtres s'ouvrent dans ma tête.

Il y a des jours ou je tourne franchement en rond ou je me donne l'impression de vivre autant de choses qu'un poisson rouge.

Dimanche dernier Monsieur Hermès n'est pas passé, quand il ne passe pas je m'imagine que je suis lui, toutes ces voix, toutes ces pensées ne sont pas les miennes, je suis monsieur Hermès, je ne suis plus rien, je ne sais rien, cette voix n'est pas la mienne, je ne le dirais pas car je ne le saurais pas, peut-être que finalement, je suis Monsieur Hermès ?

J'ai écouté, j'ai tendu l'oreille, la vie continue, chaque jour la désagrégation des fibres émets un clapotis en moi, clapotis que j'ai de plus en plus de mal à percevoir. Je reste dans mes gonds, je n'en sortirai plus

Monsieur Hermès est venu. Ca allait, je m'étais oublié. Ce n'est pas vrai, ça allait, j'étais ailleurs dans une immobilité de pierre. Alors il est venu, … Il m'a montré son tibia couvert d'écorchures … la vieille voisine écoutait derrière la porte, j'ai ouvert la porte. Je l'ai assommée avec un pot de fleur. Monsieur Hermès ennuyé est parti en clopinant de son tibia couvert de bleus et de cicatrices, la petite vieille au sol ressemblait à un lardon. Au commissariat je me suis endormi sur la chaise, la chaise aux pieds métallique vert comme avant, à l'école. Homicide volontaire, le policier portait des chaussures jaunes. Je me suis gratté le nombril, de la poussière dedans...

Je suis en éveille et j’ai peur de Monsieur Hermès. Le type du commissariat avec les grosses chaussures jaunes m’a posé des questions sur Monsieur Hermès, sur l’hôtel où il travaille, je ne sais rien, je n’ai pas de comptes à rendre …

Je suis libre à présent, relâché, le pot de fleurs est oublié. Je me suis jeté sur mon lit. J’entends le bruit de mon cœur sous mes os, le battement des veines sur mes tempes. J’ai soif, il fait chaud, je sens la sueur couler sur ma joue. J’ai peur et je suis calme. Monsieur hermès rode en moi. Je veux me souvenir du visage de Monsieur Hermès de l’expression trouble de son visage mais je n’ai plus de souvenir, je n’ai qu’un souvenir erroné du visage de Monsieur Hermès, ce souvenir vague m’accable.

Alors finalement je ne suis plus rien, l’autre renonce à être moi, et cette musique tahitienne qui s’élève. Au-dessus de mon lit sur l’un des quatre murs de ma chambre jaune, il y a accroché ce
tableau de Van Gogh , et la lumière dans la fenêtre là dans le tableau n’est plus celle d’Arles, mais celle de Tahiti . Gauguin est un autre Monsieur Hermès, et moi, car finalement je suis moi, je passe par la fenêtre…

mercredi 19 septembre 2007

Suicide - Ghost Rider (live 1977)



« Avec Suicide, je ne jouais que d'une main, la seconde me servait à me protéger des détritus lancés contre Alan Vega »
« Je sais pas mec. On en avait vraiment notre claque de la politique comme du reste. Rev voulait tuer Nixon. Rev avait acheté un billet de train pour Washington, pour aller buter Nixon à la maison blanche ? J’ai du l’enfermer dans une chambre pendant une semaine, il avait complètement flippé ; un type si tranquille … »

mardi 18 septembre 2007

Fortino Sàmano, Barthes et le punctum



Numérique, argentique ? Grande question, l’argentique c’était déjà la mort, la photographie a toujours été la mort (le cinéma la mort au travail) mais une mort conforme et unique avec de l’attente et de la solennité. Le phototype numérique c’est la mort à foison dans la vitesse et ad vitam eternam. Froideur du digital, froideur des pixels, ronds ou carrés.. L’argentique oui, du fixateur, du révélateur, ça révélait (c’est le mot.) D’ailleurs un soupçon de révélateur sur la main, et voilà des trous… et des cicatrices plus tard… nous voilà fixés... La chimie c’était la vie (même au service de la mort.) la photographie numérique elle ne perd pas que l’analogie et que l’affinité avec la vie, elle perd beaucoup plus, avec elle on trépasse sans avoir vraiment vécu, sans difficultés et dans une froideur sans mémoire…
La photographie, la mort qui rode (et donc Dieu) c’est un sujet, on peut faire avec comme Roland Barthes et sa
chambre claire (verte?) ou Georges Didi-Huberman commentant le Sonderkommando du crématoire IV ( il y a d’autres exemples…) On peut faire comme Laurent Graff un livre ni grand ni épais, cent quarante pages en gros caractères avec des blancs non parcimonieux. Un livre qui commence comme du Modiano sans brume ni nostalgie pour virer reality show sans caméra, mais avec une plume nouveau roman du nouveau roman, éditions de minuit new school. Jean Philippe Echenoz genre, si vous voyez la chose, mais en moins bien. Alors oui chez ce Graff là il y a bien de l’ironie et du détachement face à des phrases attachées au factuel, oui le livre est vraiment intéressant (et émouvant) quand en filigrane l’intime pointe (cette morte et Dieu dans tout ça) mais en gros Graff passe à côté de son sujet. - Plus par désinvolture que par manque de talent d’ailleurs-. Et nous de nous ennuyer devant une intrigue raide (Il ne vous reste qu’une photo à prendre, tout ça…)…et nous de nous ennuyer mortellement, et de tendre la main vers le Gardénal et d’invoquer dans le même élan, Dieu, Fortino Sàmano, Barthes et le punctum

Laurent Graff – Il ne vous reste qu’une photo à prendre , Le Dilettante - 160p, 15€

vendredi 14 septembre 2007

Y. Bhekhirst - Hot in the Airport (1986)



« hot in the airport, hot in the airport, hot in the airport
tonight, tonight, tonight
you are looking for a friend
for a friend, for a friend
and you sing, and you sing
El amor, oh, oh
Que contento quedo yo »

Joy Division, plus New Creation, plus Holger Czukay ou Jandek produit par Martin Hannett ou les Shaggs pleines de neuroleptiques backing band sournois d’un ténor bizarre recruté dans le motel du coin. ? Vraisemblablement il y a de ça, mais pas que… Un incontestable fou chantant ? Oui certainement !
Hum hum ! Vous allez me dire, mouais les fous chantants ça va bien cinq guillerettes minutes, les Shaggs tout ça au-delà du folklorique amusant, agacent l’auditeur ! Hé bien détrompez-vous mornes pleins ! A la différence de mon voisin fou du dessus (Régis) qui chante et joue d’écrasées mélopées sur un piano désaccordé ( c’est vrai), Y. Bhekhirst lui est un grand innovant accidentel … l’inventeur du post punk latino élastique et gymnopédique c’est vous dire ! Un olibrius ayant offert à l’humanité hébétée ce seul et unique album connu : « Hot in the Airport » en 1986.... chose assez perturbante ( donc Joy Division, Shaggs et Holger Czukay) , chose qui ne se rattache à rien ce si n’est à sa propre incompétence technique, une œuvre de fou par un fou certainement, mais il y plus, il y a un style…


Nb : Cet objet pour le moins aérolithique qu’est « Hot in the Airport » ne serait pas le seul opus du bonhomme qui enregistrerait selon certains informateurs, moult efforts musicaux depuis 1964, et ce sous divers pseudonymes plus ou moins croquignolets… Jose Hugo, Diazz Guzman, Y. Bhekhirst - toute une flopé d'alias cinoques à consonance le plus souvent hispanique, olé ! un genre de serial killer chantant en somme…

L’album est en écoute et en téléchargement par là :
http://blog.wfmu.org/freeform/2006/07/hot_in_the_airp.html

mercredi 12 septembre 2007

Little Jimmy Scott - Sometimes I Feel Like A Motherless Child



Comme je suis sûrement plus petit que mes sentiments, comme je n’arrive pas à les contenir alors ils sortent irrémédiablement et dérivent hors de moi-même comme des filaments revêches et incontrôlés.
Ouvrez les yeux ce n’est pas Billie Holiday fermez les yeux ce n’est pas Karen Dalton, ouvrez les yeux c’est Little Jimmy Scott, déchiré, résigné au milieu du bleu sombre…

lundi 10 septembre 2007

Glenn Mercer - Wheels In Motion (2007)



Sorti en catimini et dans une indifférence polie ce disque de Glenn Mercer est pourtant ce que l’on a pu écouter de mieux dans cette pour l’instant assez morne année 2007 (été frisquet, élections patibulaires…) Une chose classique louvoyant le plus souvent vers le troisième Velvet avec quelques traces raides des premiers Feelies ; vous voyez « Crazy Rhythms» ce grand disque qui inventait par la bande, discrètement et sans pancarte d’expérimentateur en chef brandie à la face d’un monde qui lui ne demandait rien si ce n’est d’écouter « Born to be Alive » et Patrick Hernandez en paix .
En fait « Wheels In Motion » est un disque de Glenn Mercer mais aussi un disque des Feelies sans Bill Million, donc s’il y a de l’intime dans les lyrics pour le reste nous sommes en terrain connu , avec moins de rigidité et d’invention qu’en 1980 et moins de guitares boisées qu’en 1986 (le merveilleux, The Good Earth) un peu à mi-chemin dans l’inspiration qui est donc raide et garnie , un peu dans les frondaisons avec de très beaux hauts « Whatever Happened » « Here and Gone » et si peu de bas…qu’il n’y en a pas. D’ailleurs en parlant de haut et de bas même « Within You, WIthout You/ Love » cette reprise casse margoulette des Beatles passe la rampe telle une sauteuse en hauteur svelte et croate. Donc écoutez ce disque et priez pour une arrière-saison solide et chaude…

vendredi 7 septembre 2007

Bobby Darin - If I Were A Carpenter



C’est en cherchant en vain quelque chose de Tim Hardin en dehors du sempiternel passage à Woodstock que je suis tombé (c’est le mot) devant cette version de « If I Were A Carpenter » par Bobby Darin . Une version plus légère, un peu au milieu de la route, mais complètement flottante, douce et dans la retenue, (quand on entend ce qu’a fait Hallyday de la même chose on ne peut être qu’atterré.)
Il faudra un jour (ou pas) se pencher sur le cas Darin… début teen idol dans l’usine à tube Brill Building, passage par une autre usine : Hollywood… pour finir démocrate, impeccable soutien d’un autre Bobby (Kennedy) et animateur TV.... Sorte de Sacha Distel puissance mille, mort le cœur explosé neuf mois après avoir enregistré cette belle version de « If I Were A Carpenter » …

mercredi 5 septembre 2007

Ptôse - Ignobles limaces (1984)



Le ronflement, le bruit de mouchage, la vermine, le hoquet des dames oblongues, la stimulation de la zone G quand l'endroit est déjà un peu mouillé et les dames oblongues bientôt en geyser, comme le Bellagio le soir quand il fait noir…
Le sacre du printemps, cette crasse du tympan, la chute de l’urine, la chute des larmes, l’étonnement l’ennuie et la colère qui monte quand le désir lui descend..
Boule (Viens ICI !) : on dîne ! Giraudoux ce con lui incapable d’imaginer les globuleux Résidents, incapables d’imaginer leur version française : les ptôses de Niort…. Des fils à dada bardés de minimoog les ptôses de Niort, des olibrius mid eighties qui vocifèrent avec beaucoup de sérieux (car il faut être sérieux) des choses énigmatiques sur la vermine, sur les limaces, vous voyez tous ces animaux aimables qui eux rampent et bavent. Là où Giraudoux ce con n’imagine rien ne voit rien et n’anticipe même pas les ptôses de Niort, Maurice Genevoix lui est encore pire, incapable de lâcher les bêtes à poil, incapable de flairer avant l’heure des lignes de synthés aussi naïves et salopiotes hein ?! Et ces guitares, comme des laconiques coups de rasoirs entamant le museau de ces saloperies d’écureuils marronnassent… bien incapable de penser à des choses aussi sournoises le Maurice, hein ! Maurice Genevoix, je ne vois rien même pas les globes oculaires, gros comme le nez au milieu de la figure ! Ah ! pour faire le malin autour des loutres y a du monde, mais pour le reste hein !
Alors que oui donc Ptôse est un malaise réjouissant, un abcès au pus lent, une romance baveuse, un rendez-vous crapoteux avec l’immonde où on se gratte et on regarde les autres se gratter devant les femmes fontaines…,
C’est décidé, je vais noyer Ophélie pour de bon, j’ai envie de faire un trou dans la couche d’ozone, mais une curieuse migraine me barre le front.. Alors, voilà, je me perds, je m’égare, je ne suis plus là, je passe par le trou dans l’ozone et voilà Giraudoux me regarde de biais, et il me tance, et je le frappe entre les deux yeux, et je tombe, il me reste assez de force pour tomber, voilà…

Ps : Ptôse c'est aussi deux trois choses sur le mythique label « sordide Sentimental »

lundi 3 septembre 2007

Canned Heat - On The Road Again



Toute une philosophie de l’existence voyez-vous… quand The Bear sur la fin gigote à coté du type qui triture les peaux c’est comme si on déplantait le saint Graal
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