lundi 30 juillet 2007

Robbie Basho - Venus in Cancer (1969)



Etrange après-midi ! Etrange soleil jaune, enfin un air moins vif, plus langoureux et d’une tiédeur maternelle. Avant l’heure où les thés d’après-midi finissent, loin de la nuit qui tombe tard, on voie au loin de petites taches brunes et d’autres d’infimes couleurs qu’on pourrait prendre, dans le ciel bleu saturé, pour des moucherons ou pour de minuscules oiseaux. Des colibris, modestes trochilidés pouvant battre leurs ailes de quinze à quatre vingt fois par seconde.
Je suis un oiseau ; voyez mes ailes. Le colibri prise pourtant peu nos latitudes. C’est un fait.
Je ne vous parlerais pas de ce disque et de ce vol là.
Gérard de Nerval lui se promenait en tenant un homard en laisse, le homard selon lui était préférable au chien car n’aboyant pas et connaissant les profondeurs de l’océan.
Ce soir je mange un homard, le petit tient le grand en laisse.
Je ne vous parlerais pas de ce disque.
Que m’est-il arrivé ? Me voilà face au disque du soleil, alors que j’étais tout en haut, dans le rien désiré, inaccessible, dans une immobilité parfaite, dans l’apaisement définitif et loin de toute opération mentale. Parvenir à la clarté, à l’éveil, à la transparence, devenir une chose d’ici, qui signifie et le soleil et la terre.
Je ne vous parlerais pas de ce disque, c’est un disque indien.

- Au bord d’un tapis vert un honnête magot ;
- Un cigare réduit à l’état de mégot ;
- Le disque du soleil dans le ciel de Neptune ; )))),

samedi 14 juillet 2007

Jake Holmes - The Above Ground Sound of Jake Holmes (1967)


« Il y a des jours où j’ai de brefs moments de présence aux choses et aux autres, où la vie m’amuse. Michaux a très bien exprimé cela dans Ecuador : « dix, quinze minutes, voilà ma vie »
Nicolas Bouvier - Routes et déroutes

Ce premier album enregistré en 1967 est de très loin le meilleur de Jake Holmes. Il est d’ailleurs tellement bon qu’il faut bien se demander comment la carrière du bonhomme a bien pu péricliter par la suite dans le folk-rock le plus assoupi qui soit ? Peut-être que tout ce que Jake Holmes avait vraiment à nous dire était-il là (?) dans ce disque en forme de cible The Above Ground Sound  et que le reste, hypothétique queue de la comète, n’était et ne sera jamais rien ou tout comme : sorte d'épiphénomène à observer ou pas.
Concentrons-nous donc sur le noyau de cette comète et bien évidemment sur sa chevelure bienheureusement traînante…
Bien joli astéroïde ma foi, avec une chimie assez simple dedans : une voix, trois guitares et rien de plus , restons sobres ( quoique sergio-leoniens) « a songwriter, three guitars and a mirror. » Pas l’ombre d’une quelconque rythmique à l’horizon, si ce n’est cette basse qui charpente le flux sonore. Une voix qui semble parfois se débattre avec elle-même et d’autres fois s’enrouler autour des guitares qui elles passent par toute une gamme de carnations chromatiques. Humeur astringente et désincarnée, abrasivité quasi-velvetienne… folk méandreux flottant vers des rives arpentées par Buckley père et son guitariste Lee Underwood, et uniquement eux. Ballades narcoleptiques à bouquet âcre, acid folk-jazz vraiment acide… hantise de la solitude et solitude des phantasmes… Et ce titre là  Dazed and Confused merveille pillée par Jimmy Page et son gros aéronef. Jake Holmes attend toujours ses droits d’auteur, nous avons le droit d’êtres pris de stupeur et confus pour lui.

Climax - Dazed and Confused

jeudi 12 juillet 2007

Journal d’Alexandrie (3)

 « Mountolive » le troisième volume du « Quatuor d’Alexandrie » est selon Lawrence Durrell : « une affaire naturaliste. » Un livre orthodoxe qui recoupe les deux premiers romans en plusieurs endroits. Aucun jeu sur les strates narratives (des bouts épistoliers guère plus), aucune fantaisie - sur le et les temps - et à priori et de prime abord rien sur cette bonne vieille relativité qui nous retombe dessus tout le temps.. Durrell fait mine de fuir la partition proustienne pour cheminer chichement dans la clarté apparente d’une comédie humaine balzacienne… Nous voilà donc et très clairement en la compagnie de Mountolive, dandy diplomate jusqu'à présent un peu vague et pas très défini et qui devient là en quelque sorte l’axe du récit. Un axe assez so british agrippant toute l’histoire dans une tonalité et des motifs apparemment différents… Le roman se fait plus politique ( les complots Coptes de Nessim , la diplomatie bien peignée de Mountolive) et de nombreux passages des livres précédents sont racontés pour la seconde ou troisième fois dégageant ainsi une vraisemblable et nouvelle complexité. Tout dans « Mountolive » paraît plus concret, plus attaché au tangible des explications, moins impressionniste et plus net en façade, naturaliste en somme. (Darley l’intermittent narrateur est remplacé par une voix un peu neutre et omnisciente, une voix qui semble posée là pour faire le point..) Plus de clarté ? Peut-être pas tant que ça , cette somme de concret n’est qu’un jeu de dupe ! Et Durrell n’est jamais dupe de lui-même ! Il faut le voir par exemple dévoiler un coin de réel bien palpable pour mieux réamorcer son récit vers d’autres hypothèses narratives. (La liaison de Mountolive avec Leila…le suicide de Pursewarden…) Plus il fait le point plus le mystère semble s’épaissir... Reste qu’au-delà des nouvelles brèches ouvertes dans la comédie humaine « Mountolive » est certainement un livre trop massif (jurassique) et pas assez tremblé. Il y manque notamment le flottement pointilliste de « Justine » et la singulière force poétique de « Balthazar ». On verra donc ce troisième volume comme le livre des faux éclaircissements, passage obligé qui plus qu’il n’éclaire ajoute du poudrin au quartz du récit. Peut-être pour Durrell faillait-il en passer par-là avant d’entamer son « Temps retrouvé », Cléa ?

lundi 9 juillet 2007

The New Creation – Troubled (1970)



Sus au xian folk ! Voilà le garage xian ! Oublions les guitares en bois et l'éthérée rédemption ! Voilà nos amies les « New Création » voilà l’électricité ! Elles ne semblent jurer que par les fleurs dans les cheveux, nos New Création.. Jésus...Che Guevara...la contre culture et même la révolution ! Des Shaggs hippies sans un papa pousse au crime derrière mais encore un peu hiératiques et avec une sorte de secte en mousse qui les poussent derrière (Le Jesus People movement, tentative de greffe catholique sur le mouvement hippie)
« Countdown To Revolution ! » Le premier titre de nos amies est l’exact résumé de la situation, une expérience psychédélique (assez terrible pour les esgourdes, moins pour les zygomatiques) un embrouillamini lysergique à bougies avec bandes passées à l’envers, bruit du canon et maelstrom sans nom . La révolution (super), la guerre (brrr), le Congo ( ?), le Vietnam, Jésus Christ et la rédemption passent (et même la fumette…)
Le reste de l’album qui est plus garage et moins « expérimental », bourdonne Shaggs avec de temps à autre d'aléatoires remontées velvetiennes, boiteuses et rachitiques. Une plausible Moe Tucker qui tambourine et un vrai garçon à la guitare (sommaire) qui nous fait Sterling Morrison sans le savoir et chante par instant comme un Lou Reed fixé à l’eau bénite (quand il ne sifflote pas).
Il faut bien avouer que l’écoute de cette chose pour le moins aérolithique ne peut se faire sans une distance respectable face au sujet ouï. Peut être que par exemple l’utilisation d'un assortiment bien choisi de substances illégales pourrait hypothétiquement et hypocritement révélé à l'auditeur la vraie nature de ce disque : du bidule psychédélique indéniable. En tous les cas c’est plus une curiosité qu’autre chose, la curiosité est un vilain défaut. Amen !






NB : Il n’y pas de bassiste, le bassiste est décédé ou n’a jamais existé
Climax - Sodom And Gomorrah

mardi 3 juillet 2007

Lang, un bon bûcheron



« Scarlet Street » remake de « La Chienne » de notre ami Renoir par le tout raide Fritz...

Ce qui faisait la force de « La chienne » première, c’était cette perception impressionniste de la pâte humaine, de la bonté supposée, de la saloperie supposée, dans une histoire vaudevillesque en sombre, qui se terminait en pied de nez sardonique ; mais terriblement philanthrope voire plus, avec de la drôlerie, de la comédie humaine, de la lumière et des morceaux plus sombres : les morceaux d’une tragédie en marche un peu forcée. Dans le remake de Lang que nenni ! tout ça ne l’intéresse pas vraiment. Le film se contente d’être un vaudeville charbonneux où Fritz somnole (et nous avec).
On se réveille sur la fin (le meurtre, le faux coupable tout ça) quand notre copain cyclope quitte les copeaux du théâtre filmé, la sciure et le contreplaqué pour se retrouver dans son territoire (avec sa hache) , celui de la sourde ambiguïté. Des fautifs encaustiqués par un monde coupable.
Ah ! Toutes ces histoires de coupables et tout le tremblement, c’est vraiment du gros bois. Chez l'ami Renoir la culpabilité ne se mesure pas vraiment car chacun a ses raisons. D’ailleurs cela nous donne sur la fin de la « chienne » (qui nous importe) un Michel Simon, libre et émancipé d’une quelconque rédemption. Futur Boudu nettoyé de lui-même au sens propre (mais crasseux) que l’on pourrait opposer au lent chagrin monotone et ressassant d’un Edward G Robinson, pourtant très bon mais trop propre sur lui, encore trop sale intérieurement et pas libre quoi ! Ruminant sa culpabilité dans le noir. Voilà du Lang, sinon lui Lang (L’ex à Thea von bidule Salope !) il est très bon tout le temps, quand ses intérêts trouvent un point de contact avec la commande, comme tout bon bûcheron.

dimanche 1 juillet 2007

D.I.Y : Come Out And Play - American Power Pop (1975-78)



Une compilation n’hésitons pas à le dire : indispensable ! Un must et un point de départ pour les pauvres hères en quête de savoir ! Tout y est quasiment admirable, entre les grumeleux Diodes, le glapissant Pez Band ce sacré coquin d’ Artful Dodger (mon Dieu quel beau riff !) et le très oublié Tommy Hoehn qui nous fait Télévision et Tom Verlaine à lui tout seul mais sans faire le zozo en se la pétant Ornette Coleman lui ! Et je vous garde le meilleur pas loin là derrière … vous voyez là derrière ? oui les Scruffs c’est ça les Scruffs ! Les merveilleux Scruffs! Les séminaux Scruffs ! Quel groupe prodigieux ! Des chansonnettes étranglées et merveilleusement adolescentes : Les Scruffs ! Plongez au cœur des Scruffs c’est un ordre ! Sinon et pour retrouver le sens commun, il y a sur cette compilation l’un des titres les plus tonitruant des tonitruants Cheap Trick : « Southern Girls » (argh ! les clap hands!) et pour finir haut très haut le « I Am the Cosmos» du dérapé malencontreux Chris Bell, l’une des 26 meilleurs chansons au monde, assurément !

Climax - Chris Bell - I Am the Cosmos

The Quick - Mondo Deco (1976)



Si le goût de l’aspartame vous reste fâcheusement sur le bout de la langue, si les mets fermement sucrés ne vous font pas sombrer dans un diabète quasi létal ! Si l'effroyable sucre ne vous effraye pas ; sachez alors que ce disque follement non édulcoré est fait pour vous ! On pourrait d’ailleurs l’ingurgiter goulûment comme définitif parangon power-pop dans un geste suicidaire évoquant le fier, altier et poisseux Cherry Coke toisant une tristounette canette de Coka Zero gisant, elle, écrasée par les mains psychorigides d’un tout frais adepte de la perte de bedaine … Ah l’allégresse des corps encore sveltes ! (avant le stade des dents pourries, le sucre ça gâte). Pour mieux situer et recentrer les débats tout en n'oubliant pas la chose glucidique, sachez que les Quick sont produits et mitonnés par le caraméliseur Kim Fowley et qu’en l’occurrence là sur cette affaire le toqué à toque nous sort des fourneaux un genre de girl groupe sans girls ! des Runaways en mecs ! avec un curieux savoir-faire dans la recherche de l’innocence pop ! Une très bonne reprise des Fab Four « It Won't Be Long »’ avec ce petit piano là qui titille les papilles, une autre reprise des Four Seasons « It Won't Be Long » avec cette basse amortie par la Chantilly ! Et les compositions des Quick (œuvres du guitariste Steven Hufsteter) pour le dire vite tiennent également bien en bouche, « My Purgatory Years » avec son léger ressentiment adolescent… « Don't You Want It » ritournelle pleine d'acide gluconique avec ce semblant de clavecin dans le fond et cette saveur Sparks presque ! En 1976 les Quick posaient bravement sur leur pochette avec chacun un cornet de crème glacée en main, à présent en nos temps d’aspartame je les imagine difficilement sveltes (ou vivants), nos temps sont bien ternes, même pas étonnant, non ?!

Nb : Le chanteur c’était Danny Wilde (Ce qui ne s’invente pas !), Steven Hufsteter le guitariste sera membre des Dickies par la suite (Ce qui ne s’invente pas !) et Danny Benair le batteur fera monter la Chantilly chez Three O'Clock... nous y reviendrons plus tard le Paisley Underground n’étant pas au programme du jour…